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mardi 3 mars 2009

SANS DELAI ET SANS DELIT, DHELIAT !


Théo (Théophile) vit depuis deux ans avec Sam (Samy). Ils ont décoré de fort jolie façon un petit F2 dans le 15ème arrondissement de Paris. Au début ils n’osaient pas se parler. Théo, coiffeur pour dames et ancien toiletteur pour chiens (une véritable reconversion !) est d’un naturel timide. Aussi, quand il a dû déclarer son amour à Sam, ce fut épique. Il bredouilla, ânonna quelques mots maladroits. Sam, styliste chez Ted Lapidus, a laissé faire. Il n’était pas insensible au charme de Théo qui lui rappelait son teckel finnois (une race en voie d’extinction) tant sa chevelure était dense et son sourire malheureux.

Puis les choses se sont précipitées. L’amour fait de ces miracles ! Théo a revendu son studio du 14ème à un couple d’hétérosexuels tendance écologistes subliminaux en mal de reconversion dans le bouddhisme new-age. Il est venu s’installer chez Sam avec sa souris blanche vaccinée et la cage qui va avec. Ils ont immédiatement opté pour un PACS, suivant en cela les bons conseils de l’oncle de Sam, avocat au barreau de Nanterre et grand amateur de Veuve Clicquot.

Après une âpre journée de travail les deux hommes aiment se retrouver, à siroter une bonne bière « Chti » bien lovés dans un canapé Ikéa, acheté avec 30 % de réduction en tant que modèle d’exposition. Il n’y a pas de petites économies !

Ils se retrouvent très vite devant la télé pour suivre leur émission préférée : il s’agit de la Météo d’Evelyne Dhéliat. Tout gay qu’ils sont, ils ne peuvent se priver de la jolie frimousse de la météorologiste de Tf1.

- Elle a encore mis une superbe jupe, lance Théo
- Moi, j’adore sa coiffure ! C’est maman qui avait la même coupe de cheveux ! Ca lui va vraiment très bien !
- Elle me fait aussi penser à ma mère. Dieu ait son âme. Surtout dans sa façon de se pencher, comme ça, légèrement, en pliant les genoux, avec une grâce infinie.

Evelyne, c’est leur égérie. C’est la femme incarnée, c’est la mère qu’ils n’ont plus. Qu’importent la tempête, le vent, le mistral prévu, l’inévitable gulf-stream, les risques d’avalanche, les précipitations, l’amas de stratonimbus, les cohortes de cumulus ; ils ne voient qu’elle.

Peu leur chaut la carte de France, parsemée de nuages par ci, inondée de soleil par là et que commente, avec un zèle professionnel inénarrable, leur idéal féminin.

Ils ne voient qu’elles. La seule femme qui soit digne, belle, aimable.

De sa bouche naît le mot pluie : ils entendent plaire, ou pleurs.

De cette orifice que de délicates lèvres dessinent, ils devraient ouïr « orage ». Ils devraient, mais ils entendent « Aurige »… Et ils repensent à Delphes, le musée, leur voyage de noces…

De cette auréole mobile et gracile qu’émaillent de jolies dents d’albâtre s’évente le mot «
Tempête ». Eux, envoûtés par la volupté de la pythonisse climatique n’entendront que « Champêtre ». Et déjà de rêver à un déjeuner sur l’herbe, avec Evelyne dans son plus simple appareil, dans une dynamique picturale à la Manet…

Puis il se rengorgent de qualificatifs à son égard...

Ils se frottent les mains à l’idée que Laurence Ferrari, au cours du JT, prendra deux minutes pour discuter de météorologie avec Evelyne.

- C’est nouveau qu’ils fassent cela sur Tf1, lance Sam ! Avant on n’avait pas droit à Evelyne au cours du journal. C’était avant et après. A présent on peut la voir trois fois ! C’est génial !

Tout en caressant l’abondante chevelure de Théo, Sam ne perd rien du spectacle magnifique de la déesse prévisionniste.

C’est comme un instant de grâce, d’éternité…

Dans le petit salon cossu de l’appartement du 15 ème il n’y a plus qu’Evelyne et Sam et Théo !

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