Les sirènes d'Alexandrie chantent encore la même mélodie, celle de la mort qui frappe. Elie, le copte, a perdu un membre de sa famille dans l'attentat perpétré contre son église.
Elie marche le long de la rue, le cœur gros et la peur qui le taraude. Il sent confusément une nouvelle menace, une sensation malsaine de drames imminents. Depuis plusieurs semaines les Chrétiens d'Orient sont la cible des fanatiques musulmans.
Comment leur dire qu'opter pour copte n'est pas un blasphème pour Allah et Mahomet son prophète ? Comment leur signifier qu'il y a place pour un multiconfessionnalisme même au cœur de l'Egypte moderne depuis la mort de Toutankhamon ?
Elie se retourne au moindre bruit. Il porte comme une marque d'infamie ce tord d'être le fidèle du patriarche Chenouda III, de fréquenter les églises, de considérer Jésus comme le fils de Dieu !!
Comme tout a bien changé ! Il revoit son enfance et ses espiègleries avec Ali, le petit musulman qui lui fourguait des pâtisseries maternelles quelque peu sucrées en prétextant d'un diabète précoce. Il repense à Fatima, la maîtresse qui leur enseignait la tolérance…
Comme tout a changé ! 21 morts ! On a tué des gens qui priaient !! Et Moubarak le Président qui ne fait rien si ce n'est condamner cet acte immonde !! La ville se vide de ses chrétiens ! L'exode mu par la peur !! Cette peur qu'hisse l'âme de l'obscurantisme !
Le croissant intégriste, en vil héros, tord les pâles rayons du christianisme oriental.
Elie copte erre…
Dans sa tête les sirènes d'Alexandrie chantent encore la même mélodie…