L'opération Jaque (échec) aura demandé un an de préparation pour l'armée colombienne. Il faut dire aussi qu'on doit donner du temps au temps, comme dirait l'autre. On envoie des agents de renseignements boliviens pour qu'ils infiltrent le sommet hiérarchique des Farc : le secrétariat. Puis on gagne la confiance jusqu'à convaincre les géôliers de réunir 15 otages (dont Ingrid Betancourt) en un seul endroit à la demande expresse du nouveau chef des Farc, Alfonso Cano.
- C'est Cano qui l'a dit ! Et je suis son bras droit ! A ses ordres Cano m'allie ! dit le faux Farc
- Si c'est le Cano qu'on connaît, c'est d'accord ! dit le vrai Farc candide.
On envoie ensuite un hélicoptère de l'armée, complètement maquillé, disons "décamouflé" pour ne pas être reconnu ! Sinon c'est l'échec ! Quel camouflet !
A bord, des soldats colombiens déguisés en guérilleros, avec des tee-shirts à l’effigie de Che Guevara (cela ne s'invente pas !).
On se pose, on dit que les otages doivent être mutés ailleurs.
Les 15 otages montent escortés de guérilleros (de vrais Farc eux !)
L'hélicoptère décolle. A l'intérieur les vrais guérilleros sont neutralisés sans peine par les faux !
Ingrid comprend qu'elle vient de retrouver la liberté ! Un vrai miracle !
Uribe, le président de la Colombie, peut se vanter d'avoir donné un coup terrible aux Farc.
Lui, d'habitude si terne des sens, rit ! Il se déconstipe ! Il est gai, rit, héros !
Oui, il devient le héros du pays car il a libéré Ingrid, l'icône francolombienne de l'opposition farouche à ce mouvement soit disant marxiste mais surtout narcotrafiquant.
Sur Tf1 et France 2 on attend impatiemment le discours de Nicolas Sarkozy. On sait qu'il a toujours mouillé la chemise pour négocier une libération d'Ingrid.
Mais Nicolas se fait attendre. Alors PPDA interview à tout venant, Pujadas en fait de même sur la chaîne rivale. Tout le monde y va de sa petite satisfaction, à sa grosse joie : Hollande, Devedjan, Voynet, Bayrou. Un beau ghotta ! A quelques minutes d'attente près on aurait eu droit aux impressions de Benoît XVI, de Fidel Castro ou de Dany Boon (hein ?) !
Heureusement, Nicolas se montre devant les caméras. Entouré de la famille d'Ingrid, il est magnifiquement ému, infiniment reconnaissant à l'égard de Mr Uribe, particulièrement dithyrambique sur l'armée colombienne. Quand les enfants d'Ingrid prennent la parole, il se met au second plan en multipliant les tics de mâchoires comme pour contenir une émotion par trop visible. Le problème est de ne pas pleurer devant les caméras ! On a sa dignité, quand même !
Les enfants sont heureux. Ils vont retrouver leur maman !
Bernard Kouchner jubile : il prend l'avion avec la famille pour rejoindre Ingrid, à Bogota. C'est toujours ça de pris, loin du Président.
Mais Uribe se pose des questions : Ingrid Betancourt ne va-t-elle pas, à présent, briguer le poste de président ? Il serait mieux, pour lui, qu'elle restât en France !
Il a téléphoné à Nicolas pour faire avancer les choses :
- Salut Nicolas ! Tu te rappelles ta promesse ? Héberger les Farc repentis dans ton beau pays, ta douce France. Tu leur avais dit aussi qu'ils auraient un petit pécule !
- Ca tient toujours ! Et encore bravo pour ton opération militaire ! C'est pas avec l'armée de M... que j'ai ici que je pourrais accomplir de tels prodiges ! T'es au courant pour Carcassonne ?
- Oui, confondre des balles réelles avec des balles à blanc ! Enfin, bon, tu peux penser à remettre en branle l'hébergement de mes indésirables ?
- Oui, bien sûr. Mais pourquoi tant d'empressement ?
- Si tu crées, en France, un centre de réinsertion des narcotrafiquants colombiens, cela m'arrangerait bien ! Il faudrait aussi en confier la direction à Ingrid !