Dans une « lettre aux Français » dévoilée le
13 janvier, Emmanuel Macron a quitté sa sphère jupitérienne pour parler
aux Français et surtout aux gilets jaunes afin de les calmer à base de
lénifiants participatifs. De sa plus belle plume et avec un style haut, notre Président a proposé de baliser un grand
débat autour de 35 questions (et qui ne toucheront pas que Sains, Foix,
Sète) qui concernent les impôts, la dépense et l'action publiques,
l'organisation de l'Etat, les collectivités publiques, la transition
écologique, la démocratie et la citoyenneté, dont l'immigration.
Emmanuel a bien précisé :
- cette
concertation, qui n'est ni une élection, ni un référendum », « est
une initiative inédite dont j'ai la ferme volonté de tirer toutes les
conclusions ! J'entends transformer avec vous les colères en
solutions ! Vos propositions permettront donc de bâtir un nouveau
contrat pour la Nation, de structurer l'action du gouvernement et du Parlement,
mais aussi les positions de la France au niveau européen et international. Je
vous en rendrai compte directement dans le mois qui suivra la fin du débat
L’homme de l’Elysée, loin d’être démissionnaire,
n’utilise pas qu’à demi si haut nerf de la guerre : le dialogue !
Logiquement, sauf à être sourd et borné, le gilet jaune lambda devrait
s’assagir, ne plus aller où l’attire l’ire afin de s’économiser. Il devrait
prendre la parole et s’exprimer même s’il reste avec des rêves d’or alités.
Emmanuel Macron en profite aussi pour se mettre en
campagne en vue des futures élections européennes. Il fait coup double en
pensant au pendentif (une pierre de cou) qu’il vient d’offrir à Brigitte. Il a
lancé le grand débat le 15 janvier à Grand-Bourgtheroulde, dans l’Eure et
à la minute qu’il souhaitait. Dans ce bourg au nom fleurant l’anglicisme, il a
dialogué avec près de 600 maires et élus du coin afin de tester leur avis sur
ce débat et de comprendre ce que leur norme en dit.
Le 18 janvier, il s’est rendu à Souillac (Lot) où, de
nouveau, il a récolté des doléances d’une ville qui vieillit et où se souille,
âgée. Il a répondu à toutes les questions qu’on lui posait : le retard
pris sur le reste à charge zéro en ce qui concerne les prothèses auditives,
dentaires et visuelles, la nécessité de dessertes de trains dans le Lot,
l’indexation du tarif des toilettages pour chiens sur le prix du manteau de
vison. Les participants ont pu s’apercevoir que le chef de l’Etat était très au
courant des dossiers et qu’il faisait preuve de pédagogie pour expliquer
pourquoi il dit non à certaines revendications.
D'ici à la mi-mars, le chef de l'Etat a prévu de
participer à une dizaine de débats avec les maires des 13 régions, histoire de
se réhabiliter auprès des édiles qu’il n’a guère ménagés par des coups de rabot
sur les dotations globales de fonctionnement de l'Etat pour les communes !
Quelque 5.000 communes rurales ont d'ores et déjà mis
à disposition pendant un mois des cahiers de doléances, à l’image de ceux qu’on
pouvait trouver lors de la révolution (les gilets jaunes ont juste remplacer
les sans-culotte) pour y recueillir les requêtes de leurs administrés. Chacun y
va de sa petite requête, avec beaucoup de fautes d’orthographe et, parfois,
composant par son esprit l’aigre-amer.
Cela n’étonnera personne que le pouvoir d'achat,
l'injustice fiscale et la diminution de l'offre de services publics en milieu
rural arrivent en tête des préoccupations. Les trois points sont liés : en
faisant payer les riches, en phagocytant les paradis fiscaux, en acculant les
patrons à verser davantage de primes que de dividendes on met du beurre dans
les épinards du salarié, on récupère une manne fiscale à même de financer,
dignement, des services publics.
En écrivant sur le cahier ils sont nombreux à espérer
que leur appel ne sera pas enterré pour des obsèques de seconde classe et de
con-doléances.
L'organisation du débat devait être confiée à la
présidente de la Commission nationale du débat public, Chantal Jouanno. Mais,
au cœur d'une polémique sur le montant de son salaire, elle a annoncé le
8 janvier qu'elle jetait l'éponge et se retirait du pilotage du grand
débat, afin de garantir les conditions « sereines » de son
déroulement ! C’est vache pour elle mais, que voulez-vous : ils
s’indignent les tiers de par les hauts salaires (laitière de par lait aux
Salers ?)
Un duo de ministres - Emmanuelle Wargon (Transition
écologique) et Sébastien Lecornu (Collectivités territoriales) - a finalement
été chargé de faire vivre le grand débat national, avec l’aide de 5 garants
désignés pour assurer « l’indépendance et la neutralité » de la
consultation.
Pour le gouvernement, il n'est pas question que le
débat devienne déballage ! Tout débat laid fera l’objet d’une chasse aux
sorcières. Débats tondant les roux seront aussi proscrits pour atteinte à la
couleur des cheveux. On veut débats sains, parisiens ou autres, capables de ne
pas nous bassiner ! Débats, l’hiver né, vite : des balivernes
évite !
Il ne s’agit pas de remettre en cause l’abolition de
la peine de mort ! Cette doléance sera purement guillotinée. Toute autre
souhait remettant en cause les droits de l’homme générerait l’interdit : débat
d’interdits s’tend (des Badinter distants !).
En revanche, on pourra évoquer la transition
écologique qui se sent bien orpheline depuis le départ de Mr Hulot. Le Français
pourra discuter de la fiscalité, hormis sur le point crucial de l’impôt sur la
fortune. Il a fort à parier qu’on reviendra sur la suppression des paradis
fiscaux : points de polémique que débat amasse !
Chaque concitoyen pourra s’exprimer sur la démocratie
et la citoyenneté même en flirtant avec le point sensible de l’immigration qui
fait de notre période l’étrange ère.
Chacun pourra proposer des améliorations pour que s’organise
mieux l’Etat et les services publics : des trains qui arrivent à l’heure, une
poste qui s’affranchit de lourdeurs qui l’enveloppent de façon un peu timbrée.
Près d'un Français sur deux a l'intention de
participer à ce grand débat, mais ils ne sont que 31 % à penser qu'il
permettra de sortir de la crise des « gilets jaunes » ! La preuve
en est : l’acte X a eu lieu et la pièce de théâtre des gilets, toujours
aussi monotone, ne chercher pas à disparaître.
Ceux qui ne souhaitent pas y participer considèrent
que « cela ne sert à rien » (37 %), n'ont pas le temps
(18 %) ou « n'aiment pas débattre » (16 %). Ils voudraient
sans débarrasser à l’inverse de Macron qui aspire à cent débats racés !
L’avenir nous dira si la parole apaise et libère !