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mercredi 15 octobre 2014

PETIT PAPA NOBEL


Deux prix Nobel sont venus relever notre pauvre France frappée de sinistrose ! Ça fait du bien ! On n’est pas si nul que cela finalement. A moins que les membres du Jury ne nous aient octroyé ce satisfecit pour nous éviter les abysses suicidaires.

Patrick Modiano a reçu le prix Nobel de Littérature. Le romancier des rues de Paris, maniaque des détails cartographiques a été récompensé pour son œuvre haletante qui mène les lecteurs en ballade. 

Jean Tirole, épousant le gentil rôle d’économiste a reçu le prix Nobel de cette discipline qu’il n’a pourtant jamais exercée comme agent en Tyrol. Le Toulousain est gratifié pour ses moult recherches notamment sur « l’analyse de la puissance du marché et de la régulation ». Il s’est spécialement penché sur les situations d’oligopole qui se creusent dès qu’un Etat abandonne certaines activités au profit du secteur privé. Il en résulte une dérégulation qui peut mener à des stratégies semblables à celles que l’on trouve dans les jeux de rôles : anticipation, tromperie, feintes pour tromper le concurrent… Tirole a un large boulevard d’études en devenir car la dérégulation devrait s’élargir eu égard au retrait croissant des puissances publiques dans l’interventionnisme économique. Il aura encore tout loisir de disséquer les attitudes d’acteurs du privé : coups tordus pour couler un concurrent, application de tarifs prohibitifs pour des qualités de services rendus bien inférieures à celles qu’on retirait des services publics…


J’ai imaginé ce petit scénario empruntant les titres de Modiano dans un contexte de dérégulation avancée en plein Paris post industriel.

Il se retrouvait régulièrement sur la Place de l’Etoile (d’arrêts niais) où la compagnie de Taxi Electruc  jouait de son prestige sur le marché oligopolistique des transports privés électrifiés. L’obscurité était contrariée par la luminescence de réverbères LED qu’avait fait installer l’entreprise LEDoniste, boîte privée qui s’avérait une lumière dans sa gestion agressive du parc luminaire de Paris. Il se retrouvait  là, policier superbe, magnifiquement éclairé par tant de Lux (autant que nous le savons) ! Il  effectuait la ronde de nuit en remerciant le ciel de n’avoir point été affecté sur les Boulevards de ceinture, dénommés ainsi de par leur exiguïté à travers un quartier perdu ou une rue des Boutiques obscures.
Oui, le planton, juste nommé vigile catégorie IV par sa société privée de surveillance, retrouvait une jeunesse depuis que l’Etat s’était déchargé de sa fonction régalienne de sécurité. Il ne se faisait plus traiter de sale fonctionnaire même les dimanches d’août, pourtant si dépeuplés de hargne franchouillarde tandis qu’affluent les touristes.
Il avait vu ses collègues, de si braves garçons, refuser le statut privé pour se recycler dans une autre administration : l’Offense, anciennement la Défense rebaptisée ainsi en raison des stratégies d’attaque, en moult pays, contre des armées terroristes de tous poils mais principalement barbues.
Le policier avait choisi le privé quand bien même la concurrence était rude avec d’autres sociétés de surveillance dont la fameuse « Chien de printemps » S.A. au capital de 650.000 € dirigée par une certaine Catherine Certitude, ancienne Ministre de l’Intérieur et spécialiste de brigades cynophiles à base de doberman génétiquement modifiés ayant donc perdu un pedigree jugé encore trop pusillanime.
L’homme était armé d’un pistolet laser (bad-gens) au cas où. Mais il était devenu adepte de l’anti sélection ! Il savait que les gens connaissaient son armement ! Aussi répugnait-il à l’utiliser du plus loin de l’oubli pour sortir d’une poche secrétaire un Taser de fabrication douteuse voire coréenne ! Dans le café de la jeunesse perdue, encore frappé d’acné pré pubére, il s’amusait déjà à tirer au pistolet à patates sur des verres à pieds et sous le regard complice voire laxiste de son beau-père bistrotier, ainsi que l’atteste le livret de famille.
L’amour des armes l’avait conduit vers l’horizon policier, puis vers des spécialisations de filature (à Roubaix) : suivre des inconnues qui « dealent » l’herbe des nuits en créant l’accident nocturne ! Oui, par une nuit de brume l’homme avait interpellé Dora Bruder, chanteuse à texte d’origine panaméenne ascendance suédoise, qu’il avait confondue avec  la Petite Bijou, chef de gang de la nébuleuse « Fleurs de ruine » spécialisée dans les arnaques d'un faux voyage de noces ! La méprise avait fait grand bruit à l’époque et il s’était vu rétrograder, sans remise de peine, au gardiennage du vestiaire de l’enfance, maison de correction des 13-14 ans, 14,78 ans pas plus à l’aspect décrépit de villa triste ! Il y avait végété 5 ans, à morigéner des petits merdeux à longueur de journées avec pour seule parenthèse une magie de chapiteau le temps qu’un cirque passe
Oui, il avait subi l’aléa moral en payant chèrement une erreur liée à de mauvaises conditions atmosphériques alors que, jusqu’à ce funeste écart, ses notations s’enjolivaient de dithyrambes.
Il fut finalement soulagé de voir l’Etat se défaire des services de Police pour privatiser la chose. Il rebondit  dans ce jeu de rôles aux stratégies vicieuses en s’incarnant policier en contrat privé. Il retrouva des attributions dignes de sa personnalité.  L’augmentation de ses revenus liés aux nombre de PV infligés lui permit de se rassurer sur sa solvabilité dans le cadre d’une union à risque. Il se maria dans une église assomptionniste à capital variable après être tombé amoureux d’une poupée blonde. Elle s’appelait Françoise et lui avait acheté un super GPS : « pour que tu ne te perdes pas dans le quartier » avait-elle cru bon de préciser !
Désormais il était heureux quand bien même moult Parisiens commençaient à regretter l’ancienne Police, celle qui était gratuite (oui, enfin, quand même…les impôts), arrivait toujours à l’heure pour débrouiller les affaires et parvenait régulièrement à stopper la délinquance (sauf cas contraire).
Oui, il était heureux de travailler dans le monde merveilleux et oligopolistique de la sécurité et se voyait déjà approcher par des sociétés concurrentes (dont « Chien de Printemps »), attirées par son CV resplendissant. Il parlait souvent de ce nouveau paradigme, le soir, à Françoise ! Mais celle-ci ne l’écoutait que distraitement, toute plongée dans un livre « une aventure de Choura » histoire d’un Labrador qui lui évoquait son premier chien !
Un pauvre clébard mort en mission en Afrique, broyé par un boa : maudits anneaux !!