Je reviens de Corse où je me
rendais pour la sixième fois en treize ans . L’île conserve sa beauté mais le tourisme pourrait
faire des ravages si l’on n’y prend garde. Certaines plages, à proximité des
îles sanguinaires, sont noires de monde. En 1999, j’avais campé à Porticcio, en
face d’Ajaccio. Treize années plus tard je n’ai pas retrouvé le camping :
effectivement il a été supprimé pour être remplacé par des ensembles
immobiliers.
Les zones commerciales
fleurissent à la périphérie des villes encore épargnées il y a 10 ans.
La Corse doit vivre de son
tourisme, certes. Mais elle doit aussi préserver ses racines, sa culture, ses
sites enchanteurs.
Il lui faudra du talent pour
rester attractive sans tomber dans les gémonies du tourisme tentaculaire, avide
de structures hôtelières sophistiquées et de camping cinq étoiles…
Pour la sixième fois j’ai rejoint tes rivages
Découpés aux ciseaux par tant de vagues bleuesHumé l’eucalyptus aux délicieux ombrages
Et grimpé sur les flancs de tes monts résineux.
Vers Sagone alanguie en son golfe radieux
Les premiers bains de mer loin du masque blafard
Imposé aux décors de ce Nord trop pluvieux.
Où se toisent toujours deux églises sacrées
L’orthodoxe clocher face aux croix catholiques
Entre deux mon regard s’éprend d’un potager.
De ses derniers feux joue l’éminent chatoyant
Pour charmer les vieux murs de puissance génoise
En ce Capo Rosso dont Piana se pavoise
Où tressaille le cœur sous l’éclat des calanches
Scandola réservée en ses rochers trouvères
Trouve une voix rebelle pour vibrer d’ondes franches.
En nid d’aigle bravant l’été caniculaire
Deux rivières à ses pieds coulent providentielles
Vasques, lits de fraîcheur, précieux bains salutaires
Treize ans ont érigé l’élan du modernisme
Plus d’ancien campement, le souvenir s’évente
En bourrasques d’hôtels et de plans d’urbanisme.
Que les Grâces prodigues t’ont jadis octroyés.
Ne permet pas l’éclat de marchands sacrilèges
Garde jalousement ton authenticité.
J’aimerais retrouver tes villages rustiques
L’insolente pudeur de plages désertées
Encore tout épargnée du tourisme sismique.