Audrey Bertaut et Alicia Champlon |
Des milliers de
gendarmes, anonymes et représentants officiels ont rendu hommage, vendredi à
Hyères, aux côtés des familles endeuillées, aux deux femmes gendarmes tuées
dimanche dans le village de Collobrières (Var).
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Le 17 juin, deux gendarmes sont tombées. La République pleure, car la
République est endeuillée. La justice fera son œuvre. Aujourd’hui, c’est le
temps du recueillement, a déclaré le
ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, lors de son éloge funèbre.
Alicia Champlon, une
adjudante de 28 ans, et Audrey Bertaut, maréchal des logis-chef de 35 ans et
mère de deux enfants de 12 et 5 ans, sont mortes en mission. Une mission qui se
voulait peu périlleuse. Une simple histoire de cambriolage qui a viré au drame.
Les deux femmes pensaient interpeller un simple malfrat. Elles tomberont sous
les balles d’un tueur que l’alcool a rendu violent et impitoyable. Par ailleurs
l’homme, un certain Abdallah Boumezaar, venait de retrouver une liberté après 6
mois sous les verrous pour trafic de drogues et violences. Il venait de
récidiver en brutalisant sa propre mère mais le Tribunal Correctionnel de
Toulon n’avait proposé que 6 mois avec sursis et mise à l’épreuve avec
obligation de soins.
Ainsi Boumezzar, au lieu des deux années qu'une peine plancher lui aurait infligées, s’en sortira avec six petits mois d'emprisonnement nappés d’un sursis probatoire de trois ans prévoyant une injonction de soins ! Beaucoup crient au scandale !
Le drame relance donc
la polémique sur le maintien ou non des peines planchers. Ces peines,
instaurées en 2007 par Rachida Dati, empêchent le juge de prononcer une peine
inférieure à un certain seuil en cas de récidive du délinquant. Une sorte de
garantie minimum de châtiment.
Christine Taubira, nouveau Garde des Sceaux, estime que les peines
planchers partent du principe que la prison est un outil anti récidive. Elle affirme que c’est faux puisque, dans les cinq ans qui suivent un jugement,
ceux qui étaient incarcérés récidivent dans 63% des cas, contre 39% pour ceux
en liberté conditionnelle. Le tout-carcéral ne marche pas. Pour elle, il faudrait
développer les alternatives à la prison (peines de probation, bracelet
électronique, travaux d’intérêt général…)
Le problème ne serait donc pas la peine plancher mais quel type de peine plancher appliquer ! La prison ne serait pas, en soi, la panacée !
Il va falloir plancher sur la peine plancher ! Quel type de plancher ? Un plancher des vaches très drastique mais qui serait un pis-aller ? Un plancher en Sapin avec obligation d’œuvrer pour l’utilité publique ? Un plancher en parquet pour faire plaisir au Procureur de la République ?
Faudra-t-il davantage
d’experts psychiatres ? Et l’analyse psychiatrique peut-elle se targuer d’être
irréprochable ? Devra-t-elle s’accompagner d’expertises en conduites addictives (alcool, drogue…) ?
La récidive ne prend-t-elle pas racine dans un environnement criminogène ?
Les médias ne finissent-ils pas par banaliser le crime ? Le chômage
structurel n’alimente-t-il pas, lui aussi, la plongée dans l’univers de la délinquance,
du trafic, de la prostitution ?
Toutes ces questions qui tourbillonnent sans jamais trouver de réponses durablement adaptées !
Et ce risque zéro qui
n’existera jamais. Et la mort de ces deux femmes gendarmes dans ce tragique concours de
circonstances….
Alicia et Audrey réunies dans la mort
Humidifient l’émoi de la Patrie blessée
Les deux mésanges bleues par leurs ailes brisées
Consignent en lettres rouges un tragique rapport.
Foudroyées sur le champ d’un fou cambrioleur
Qu’irriguait un ruisseau d’éthyliques remous
Elles ont vu le soleil décliner sous les coups
Et se vider la vie dans l'abime du cœur.
Couleront les sanglots sur les plaines amères
A l’ombre tamisée d’immuables colères
Deux vies pour un forfait d’apparence anodine
L’avatar meurtrier sous l’affreux sortilège
D’un feu récidiviste épargné d’un cortège
De barrages pénaux ; ô justice en sourdine !