Christine Boutin explique avoir
annoncé, à tort, ce mercredi, la mort de notre cher Jacquou, le Corrézien
élyséen, à la suite d'information venant "d'une source sûre". Problème:
il s'agissait d'une rumeur qui a aussitôt été démentie par la famille Chirac.
L'information m'a été donnée par une source que j'estime
sûre, explique-t-elle sans donner plus de précisions. Je l'ai donnée car je
pense que les Français l'attendent, preuve en est du buzz qu'il a
suscité, ajoute-t-elle !
Et c’est bien là le problème : le buzz !
Tweeter est une grande machine à buzz dont même la presse se
délecte. En moins de 140 caractères n’importe quel esprit simplet peut lancer
un message à la « vas-y que je te pousse » et il y aura toujours d’autres
esprits pour le retweeter (le diffuser de façon plus ample) ou pour s’en
indigner. La spontanéité du tweet, son instantanéité, exclut toute réflexion
méditative, éthique. Le tweeter réagit de manière compulsive, il « tweete »
à l’envi, cherchant à lancer la petite bombe événementielle avant le voisin !
C’est la course au scoop, quand bien même ce dernier se revêt, à posteriori, d’oripeaux fallacieux.
Le plus dramatique dans cette histoire est la résonance communicationnelle d’un tel message ! Comme une traînée de poudre le petit
billet de trois mots (dont un hashtag que Christine a sans doute mal utilisé !)
fait le tour de France. Pire, il va faire l’objet de multiples articles de
presse et le papier relaiera la vitrine virtuelle.
Ainsi, et pour bien d’autres circonstances, le twitter se défoule
pour passer ses nerfs ou par simple addiction au petit oiseau bleu. Il y aura
toujours un journaliste qui, nonobstant la déontologie de son métier (vérifier
les sources), prendra pour argent comptant des fausses informations amplifiées par
de simples retweets d’un petit texte initialement lancé selon l’humeur du jour
de son auteur.
Le tweet malheureux de Christine Boutin n’est qu’un des avatars de
la déstructuration du circuit informationnel. Les citoyens ont désormais le
pouvoir de communiquer à leur guise ce que bon leur semble. L’acrimonie des
uns, l’outrance des autres, déferlent sur la toile et abreuvent nos
conversations quotidiennes. Le professionnel de l’information est
progressivement acculé à rédiger
chroniques et articles sur « le buzz » ainsi généré, pour ne pas
décrocher de la prosopopée ou de la sermocination..
C’est une nouvelle manière de remplir les journaux à l’heure où
les feuilles de chou ne font pas bonne presse dans les tendances consuméristes.
Rebondir sur l’approximation du virtuel, voire sur ses
falsifications, permet désormais de nourrir les papiers quotidiens et de
freiner la lente agonie de nos kiosques à journaux.
En attendant, Chirac, quel que soit son état de santé, doit songer
au fond de son lit que cette histoire est abracadabrantesque !