Mireille Knoll, 82 ans, vivait paisiblement dans son appartement
parisien avec l’humilité que lui procurait une frugale pension. Elle vivait au
deuxième étage d’un immeuble qui en compte dix, au plein cœur du XIème
arrondissement et sa gentillesse était connue de tous.
On savait qu’elle avait porté l’étoile durant les sombres années
de l’occupation et que c’est de justesse qu’elle avait échappé à la rafle du
Vel d’Hiv, en 1942. Mireille était juive et c’est parce qu’elle était juive et donc
présumée riche qu’on l’a retrouvée morte, lardée de coups de couteau, son corps en partie carbonisé, ce sinistre
vendredi 23 mars 2018.
Deux individus sont soupçonnés de ce crime dont un qui connaissait
la victime pour lui avoir souvent rendu service, en qualité de voisin « attentionné ».
Son complice présumé affiche un autre profil, celui du radicalisé. Il aurait
crié « Allah Akbar » en commettant les faits.
Ainsi, Mireille a-t-elle été tuée pour sa religion et pour mille
préjugés colportés sur le dos des enfants d’Israël. Son corps a été sacrifié
sur l’autel de l’antisémitisme que ravivent de vieilles rancunes haineuses
teintées de bêtises ineffables.
Mireille a été assassinée pour sa richesse présumée (les juifs ne
sont-ils pas tous riches ?) et pour sa prétendue haine des Arabes (les Juifs ne persécutent-ils
pas les Palestiniens en les parquant dans de ghettos ou en colonisant leur
territoire ?)
D’antisémitisme en antisionisme, les amalgames s’amoncellent sur
le dos d’une communauté qui tremble à la simple idée d’oser porter la kippa ou
de se rendre à la synagogue.
Ce mercredi 28 mars, une marche blanche a rendu hommage à la
victime octogénaire.
Une longue foule a défilé dans Paris pour honorer la mémoire de
Mireille et surtout pour clamer que la bête immonde ne devait plus rejaillir de
l’ombre.
Mais la marche blanche se teinta de noir ! Jean-Luc
Mélenchon, chef des Insoumis et Marine Le Pen, leader du FN, avaient cru bon participer à ce cortège citoyen et humaniste.
Ils ont été copieusement conspués et acculés au décrochage ! La
manifestation qui se disait « pacifique » a dérapé pour se transformer en tribunal.
Les deux représentants politiques paient encore le poids des
amalgames. Marine écope du carton rouge que son père aurait dû obtenir pour ses
positions révisionnistes sur la Shoah. Mais Jean-Marie n'était pas là, occupé sans doute à dédicacer son livre de mémoires dans une quelconque librairie de France.
La fille a beau vouloir tuer le père,
elle hérite d’une idéologie sulfureuse.
Quant à Mélenchon, on lui reproche sûrement ses petites phrases
pro-palestiniennes. Il est victime de la terrible confusion. On peut être antisioniste,
condamner l’hégémonie d’Israël voulue par Netanyahu, sans pour autant porter le
fard infâme de l’antisémite !
Le fils de Mireille, Daniel Knoll, a d’ailleurs bien résumé l’ineptie
d’une telle violence au cœur d’une manifestation qui se voulait humainement
militante :
"Je pense
qu’aujourd’hui toute la France aurait dû être unie. Peu importe de quel parti
on vient, je m’en fous… Je pense qu’il y a des gens biens partout, dans toutes
les religions, tous les partis, toutes les couleurs de peau. Et il y a des
abrutis, et chez nous aussi il y a des abrutis. Je le reconnais et je ne leur
donne pas raison. Tout le monde aurait dû défiler dans le calme !
La dignité de cet homme aurait dû éclairer tous les esprits
chagrins.
De là où elle était, Mireille a dû pleurer de voir un tel
spectacle !
C’est si loin de ce qu’elle concevait de la vie…
Son étoile éclairait
l’épaisseur de la nuit
Quand elle
fuyait hagarde les effrois du Vel d’Hiv
Elle
revenait parfois sur ces peines transies
Dans la
mémoire des jours aux blessures si vives.
Mireille vivait
paisible en son appartement
Mais la
flamme hébraïque attira les démons
Papillons de
folie pris de noirs sentiments
Assassins
maléfiques dénués de raison
Elle était
la tendresse, une vie de douceur
Un soleil
accroché au regard souriant
Les ténèbres
ont fermé les yeux blancs du bonheur
Mireille fut
emportée dans le vent violent
Les
bourrasques balaient la sagesse des âmes
Dénaturent
une marche qui se voulait grandeur
Soufflent
dans les esprits des relents d’amalgame
La blancheur
déambule dans la rue des noirceurs.
Daniel voit
horrifié la tournure des passions
La mémoire
de sa mère s’avilit dans la brume
Opaque au
grand creuset des récupérations
Préjugés,
suspicions, tout ainsi se résume...
Dans cette
double peine fardée de dignité
L’orphelin
psalmodie la sublime prière
Que se meure
la bêtise, mère de l’indignité
Au nom de
cet amour qui l’enfanta sur Terre…