Après
les établissements pénitentiaires ce sont les EHPAD (Etablissements pour
personnes âgées dépendantes) qui ont manifesté leur mal-être. Ce mardi 30
janvier, on a vu de nombreux défilés de personnel (aides-soignantes,
infirmières) que venaient étoffer des familles en souffrance voire des
personnes âgées bénéficiaires de ces structures en déliquescence.
Il
faut dire que la plupart des EHPAD gèrent honte. Par restriction budgétaire le
personnel vient à manquer pour prendre soin des personnes invalides et on se
dit alors que toute trésorerie saine est sens !
Oui
l’argent manque pour prodiguer les soins ! Les conditions de travail, dès
lors, se dégradent. Le personnel soignant flirte l’acrimonie et l’aigre abat !
Dans certains établissements on est à 0,6 salarié par résident. Les petites
mains salvatrices n’en peuvent plus :
- On nous supprime des postes, témoigne une aide-soignante, qu’ils
soient de nuit, qu’ils soient de jour. Il n’y a plus qu’une personne par
service pour faire le ménage. Certaines chambres n’ont pas été nettoyées depuis
deux jours !
Une
litière propre devrait être sous l’âgée pour un soulagement optimum mais hélas,
le temps manque pour une équipe réduite acculée à être au four et au moulin. Le
soignant en a plein le dos ; il serait temps d’y caper un manteau de
réconfort. Seul le recrutement de personnel pourra pallier les insuffisances
qui s’assimilent parfois à de la maltraitance.
Celle-ci
peut être physique. Le soignant, à la limite du burnout, peut s’énerver sur une
vieille dame édentée. L’enfer se pose là : Dante y est. Mais la violence
se révèle souvent passive : la personne âgée est oubliée si elle ne
réclame rien ! Et parfois, pour qu’elle vous laisse tranquille, on la
surmédicalise médicalement par mets dits calmants ! On doit sans cesse
opérer un tri en l’urgence et le « ça peut attendre » ; le
service gère, y’a tri !
Cette
gestion de la rareté trouve ses racines dans le mode de financement des Ehpad
et dans la réforme gestionnaire.
Trois
sources de financement abreuvent les Ehpad :
- le budget «soins», à la charge de l'Assurance maladie, sert à
financer le personnel soignant et les équipements médicaux.
- le budget «dépendance», financé majoritairement par les
départements et en partie par les résidents, sert aux prestations d'aide et de
surveillance des personnes en perte d'autonomie (aide-soignants,
psychologues ...).
- le budget d'hébergement (hôtellerie, restauration, animation
...) est à la charge du résident qui, en fonction de sa situation financière,
peut percevoir des aides publiques.
Le
restant dû à la charge des résidents, après ces aides, a été évaluée à 1.758
euros par mois en moyenne par la Drees, alors que la pension de retraite
moyenne est de 1.376 euros bruts ! Inutile de préciser que dans la plupart
des cas on pompe sur son épargne et que les riches font des ans vieux !
Mais
surtout, depuis 2016, on cherche à fixer les mêmes règles de tarification en ce
qui concerne le volet « dépendance » pour les établissements publics
et privés. Ceux qui sont actuellement au-delà de cette tarification y perdront,
des pans entiers, des pans denses ! Or il s’agit bien de « la plupart
des Ehpad du public, qui accueillent des résidents plus lourds”, explique un
directeur. Comment quand la source tarit faire ?
Face
à la grogne, Agnès Buzin, Ministre de la Santé hélas hantée par lassants thés
autour desquels on discute, s’engage à ce que la raie forme une jolie ligne
directrice sans réductions de postes.
Sur
les 110 millions d'euros en plus inscrits au budget 2018 de la Sécurité sociale
pour les Ehpad, 10 millions doivent servir à créer des postes
d'infirmières de nuit, et 28 millions sont destinés aux Ehpad en
difficulté.
Pour
ces derniers, une enveloppe supplémentaire de 50 millions d'euros a été
annoncée la semaine dernière, pour une nouvelle étape. Espérons qu’on saura l’affranchir !
Il
serait temps de financer davantage ces structures dont l’utilité ira
croissante. Il ne faudrait plus que l’augmentation du nombre des seniors s’ignore !
En 2040, les personnes âgées de plus de 75 ans représenteront près de 15% de la
population contre 9% actuellement !
Si
Dieu me prête vie j’en ferai partie ! J’aimerais bien, sans pointe d’égocentrisme,
pouvoir bénéficier de bons soins si, malheur aidant, j’étais acculé à quitter
mon chez moi pour des raisons de dégradation physique ou mentale.