Jean-Michel
Lambert aurait tellement voulu que l’affaire ne refît pas surface, qu’elle
allât, à son tour, se noyer dans la Vologne pour y demeurer à tout jamais.
Mais voilà,
plus de trente ans après les faits, le fantôme du petit Gregory a refait
surface, replongeant les différents acteurs de ce triste mélodrame dans le
trouble le plus anxiogène qui soit.
Lambert fut
le premier juge dans l’affaire Grégory. Il avait 32 ans lorsque, le 16 octobre
1984, le cadavre du petit Grégory Villemin, quatre ans, est retrouvé pieds et
poings liés dans la Vologne (Vosges).
Seul juge
d’instruction à Epinal (Vosges), sans le but de se forger une image (d’Epinal
comme il se doit) mais pour simplement faire le job (comme disent les British)
il assuma ses fonctions. L’envie de se saisir de l’affaire et de bien la mener
monte à Lambert (Lamennais-Montalembert ? Ça sent le catholicisme libéral ?)
Dès les
premiers jours de l’enquête, quelque peu sublimé par les caméras, Lambert se
sent rugir de convictions, son état d’esprit, un peu tigre, égo, rit ! Rit
de ce qu’en penseront les gens ! ll agit comme un magistrat notable et
sonne le glas de Bernard Laroche qu’il croit coupable. Lambert, huile,
sonne !
La
culpabilité ne repose pourtant que sur les accusations de la jeune Murielle
Bolle, 15 ans ! Des affirmations sibyllines mais qui lui plaisent :
c’est l’apparat Bolle !
Puis
Murielle se rétracte, elle serait tract à tous slogans, même les plus
fallacieux. A 15 ans, on ne mesure pas le mal qu’on peut faire. Murielle marche
seule, le long de la Vologne, des remords plein la tête ; de honte se
languit Bolle (seule, en guiboles). Alors Lambert libère Laroche, trois mois
après l’avoir mis en détention. Pour tant d’amateurisme ses détracteurs le
qualifient de « petit ». C’est le petit juge qui engage une affaire
sans professionnalisme.
« Là Petit
vient emmanchant » raille un avocat boulimique vivant avec une anorexique
pour un problème d’équilibre alimentaire.
Un autre
opposant le considère trop mou et susceptible d’être trompé par de faux
témoignages. Ce à quoi rétorque un de ses supporters : Jamais Lambert n’est
lent berné !
Mais, le 29
mars 1985, alors que Laroche, aux faits des délices du yaourt retrouvé (son
dessert favori), pense reprendre le fil
de sa vie, le destin va frapper !
Il se fait tuer par Jean-Marie Villemin, le père de l’enfant, persuadé de la
culpabilité de Laroche. Quand gens marient viles mains (la droite comme la
gauche) pour manipuler l’arme le drame est conséquent !
Voilà Mr
Villemin incarcéré, à son tour. Mais le 5 juillet 1985, Christine Villemin se
voit inculpée en tant que corbeau (on devrait dire Corneille car c’est une
femme mais ça fait un peu trop littérature à Cid !). Un corbeau, en la circonstance, n’est pas un
oiseau noir qui tient dans son bec un fromage en regardant couler la fontaine.
Ici le corbeau est un homme ou une femme qui déguise sa voix pour la rendre
masculine et qui profère des menaces de mort, par téléphone puis par écrit
quand la facture téléphonique commence à coûter plus que le lot de 10 timbres
postaux.
Puis
Christine Villemin est innocentée (à ne pas confondre avec Line aux cent thés,
une herboriste patentée qu’a connu un arrière grand-oncle que je n’ai jamais
rencontré !). En revanche, Jean-Marie sera condamné à 5 ans d’emprisonnement
dont un avec sursis, pour le meurtre de Laroche : tard paie hyène mais
finit par payer pour son forfait.
Le 16 décembre 1993,
Jean-Marie Villemin est condamné à 5 ans d'emprisonnement, dont un avec sursis,
pour le meurtre de Bernard Laroche. Il sera libéré quelques jours après, ayant
purgé l'essentiel de sa peine en détention préventive, de mars 1985 à décembre
1987. Mais là encore, la justice joue les fofolles et au procès de Jean-Marie Villemin devant les
assises de Dijon, la moutarde monte au nez de l’avocat général qui tacle
Jean-Michel Lambert en le qualifiant de « mémorable funambule de la
pensée », dont il espérait qu’il avait « conscience des catastrophes
dont il avait été indirectement la cause » !
Pour tant de
dysfonctionnement, l’Etat est condamné à verser 35.000 euros à chacun des
parents de Gregory ! Ça creuse la dette, comme dirait une Sarthois qu’on
n’entend plus tellement tant sa peine est l’opérante (entends sa Pénélope
errante !).
En 2008
l’enquête est rouverte pour une nouvelle recherche d'ADN.
Le 24 avril
2013, le procureur général de la cour d'appel de Dijon, Jean-Marie Beney,
présente les résultats non concluants des dernières analyses ADN et annonce que
le dossier n'est pas clos, mais que scientifiquement, "l'espoir" de
trouver le coupable "s'éloigne".
Enfin, le
14 juin 2017, l'oncle et la tante de Jean-Marie Villemin, ainsi qu'une
belle-soeur, sont interpellés dans les Vosges, et la grand-mère de Grégory,
Monique Villemin, est également entendue, mais en audition libre en raison de
son état de santé. L’affaire est relancée.
Pour Lambert
c’est le cauchemar. Il ne s’est jamais pardonné la mort de Laroche. Il avait à
peine cicatrisé quelques plaies pour retrouver la paix et penser l’épeler :
P A I X…Hélas, ça fait « paix haïe, X… X, la plainte contre, le retour de
jargon juridique, le retour de la Presse, les interviews…
Trop lourd
pour lui.
Lambert
juge qu’il ne pourra supporter tout cela. Dans la résignation du suicide le
juge est parti.
Le corps du magistrat est retrouvé chez lui, dans
son bureau, avec un sac plastique noué sur la tête à l’aide d’un foulard, selon
une source proche du dossier.
La
recherche éperdue de la vérité se montre parfois bien assassine.
Le petit
juge s’en est allé, emportant peut-être dans sa tombe une part de vérité…