En passant devant le bar
« à la civette » rue St Honoré, à Paris, Teddy Riner ne put
s’empêcher, une fois de plus, d’admirer la civette dont l’or éclatant (enfin
imitation or) ne pouvait que lui remémorer les nombreuses médailles glanées aux
JO. Le colosse encore tout imprégné des émotions péruviennes (voir article précédent) se
posa brusquement la question de savoir ce que pouvait représenter cet animal
qu’il faille ainsi l’exhiber au fronton d’un lieu que personnellement, en tant
qu’athlète, il ne fréquentait pas pour des raisons liées à l’éthique
sportive : le tabac t’abat !
La question le titilla
tellement qu’il tourna les talons à 90° vers la droite et se dirigea vers
l’entrée de l’établissement fréquenté apparemment par de nombreux fumeurs !
Il n’eut pas à se
présenter au comptoir. Le gérant de l’établissement failli choir de son siège
en le voyant :
- Monsieur Teddy Rinner ! Quel honneur
me vaut de vous voir ici ? Attendez, attendez…
Il sortit fébrilement d’un tiroir poussiéreux une vieille photo du champion .
-
Si vous pouviez me la dédicacer ?
Teddy s’exécuta de bonne
grâce et rendit promptement le cliché qui serait désormais la fierté du vendeur
de cigares. Mais, il n’était pas là pour ça et la question qui lui brûlait les
lèvres rejaillit aussitôt :
-
Pourquoi « à la civette » ?
Quel est cet animal ?
-
Ah, et bien, heu, Monsieur Rinner, je vais vous raconter l’origine de mon
établissement. Depuis 1716, et oui, ce lieu propose aux parisiens cigares,
pipes et tabac. Installé près du Palais-Royal, il en a vu des têtes défiler,
certaines d’ailleurs sont tombées, hi, hi, hi : Danton, Robespierre…. Mais
sont venus également Beaumarchais, Mirabeau puis plus tard Manet, Verlaine et
même ce garçon manqué de Georges Sand !
- Ah oui ! Mais ma question est : pourquoi le nom de
civette ? Que représente cet animal ?
- Ah, ça mais, heu, c’est un petit mammifère dont les secrétions, hé
oui, ça vient d’un endroit pas très noble, heu, je disais dont les sécrétions
des glandes du trou de balle étaient utilisées dans la fabrication des cigares
!
- Ah bon ! Mais c’est dégoûtant ! Et on utilise encore
cette substance ?
-
Je crois bien que non ! En revanche, la civette a été
longtemps une matière première animale utilisée dans la parfumerie, au même
titre que le musc, l’ambre, la cire d’abeille… Je dis « a été » car
par la pression des défenseurs des animaux, les créateurs de parfum ont été
acculés à fabriquer des reconstitutions synthétiques. Il y a même eu un
scandale avec Chanel qui aurait, en 1999, utilisé la substance animale en dépit
des interdictions. Pour son célèbre n° 5 ! Enfin, c’est ce qu’on m’a dit !
Vous savez, je ne suis pas particulièrement au parfum !
- Oui, je sais, vous c’est plutôt les cigares. Dites-moi, cette
civette, elle vit en France ?
- Non, elle vit en Afrique mais aussi en Asie ! Enfin, heu, plutôt en Ethiopie d’où son surnom
de chat d’Abyssinie ! Oui, la bête ressemble à un chat mais possède plutôt
une tête de renard ! Mais, pour répondre sincèrement à votre question, je
connais un pote qui revient de là-bas et qui a ramené une civette ! Si
vous voulez, je peux le contacter pour qu’il vous la montre ! Il habite à
deux pas d’ici !
- Ah, heu, bien, si ça ne le dérange pas et si ça ne prend pas une
heure…je peux vous consacrer dix minutes !
Il ne
fallut pas cinq minutes pour que l’ami en question se pointe au paradis des
fumeurs de cigares. Il arborait sur son épaule le charmant animal, tacheté de
partout, à la longue queue fournie et à l’espièglerie d’un goupil commun !
- C’est vraiment une jolie bête, s’exclama Teddy ! Ça s’apprivoise
facilement apparemment !
- Si vous la voulez ce serait un honneur de vous la donner. Je
repars bientôt en Ethiopie et j’aurai l’occasion d’en ramener un autre spécimen
avec la complicité d’amis douaniers que la corruption n'étouffe pas.
-
Heu, hé bien, c’est inattendu, mais, heu, c’est d’accord !
- Il faudra simplement repasser chez le vétérinaire pour les
contrôles d’usage. Il faut dire que l’animal a mauvaise presse. En 2005, en Asie on a incriminé la bêbête à
propos de la contagion du virus H5N1 !
-
Ah ! Mais c’était en Asie ! Là, elle vient d’Ethiopie, n’est-ce
pas ?
- Oui, oui, mais vous savez… Il ne faut pas rigoler avec le principe
de précaution ! Non, il faut aller voir le véto ! Ça vous dédouanera
de toutes responsabilités !
Et
Teddy ressortit de l’antre d’incitation à la tabagie en portant sur son épaule
un nouveau compagnon. Il se dirigea vers la clinique vétérinaire la plus proche
alors que son but premier était de s’acheter un nouveau lit eu égard à la
destruction du dernier en date, pauvre litière succombant sous ses quelque 130
kg ! La vie vous réserve de ces aléas ! Il entra dans la clinique et
se trouva nez à nez avec six vétérinaires qui avaient du chien et se sentaient prêts à l’aider ; le cas échéant, à
lui faire signer des autographes...
Vaccinations,
contrôle de la tension, prise de température, conseils prophylactiques divers
et finalement, alors qu’il allait sortir de ce temple animalier, LA remarque d’une
vétérinaire lui ayant avoué son amour pour le judo :
Hé,
Monsieur Rinner, et si la civette devenait la mascotte des JO 2024 ?
La
remarque trotte encore dans la tête du géant.
Il va en parler à Anne Hidalgo !