Comme je souhaitais en savoir plus sur cette pénurie du beurre qui nous échoit, j'ai encore invité mon professeur omniscient préféré, Mr Hitérole. Je me suis aperçu que lui même se perdait en conjectures...
Fabiano : Bonjour Professeur, je reviens vous consulter pour en savoir plus sur cette pénurie de beurre qui nous afflige !
Prof Hitérole : Bonjour Fabiano ! Ah, quelle catastrophe
pour mon voisin, Rachid, un charmant jeune homme qui se fait las beur à force
de ne plus en trouver. Il me dit qu’il ne trouve plus sa tablette préférée sur
les étals. Il me dit : « Elle et vire ! » tu hèles
mais…elle est virtuelle. Il dépérit car pour lui cet aliment apporte le
nécessaire en vitamines ! La vitamine A se trouve en abondance dans le
beurre. Elle est essentielle aux cellules de la rétine. Or Rachid travaille à
l’œil. On trouve aussi de la vitamine D. Celle-ci fixe le calcium dans les os et régule le métabolisme des
tissus. Le beurre est la seule matière grasse qui en contient naturellement. Enfin
on trouve la vitamine E, antioxydant mais pas anti-occident car Rachid est
vraiment bien intégré. Oui, ça part en cacahuète et se sent las Rachid !
Fabiano : Oui, heu, bon. Recadrons ! Pourquoi Rachid et
tant d’autres gens ne trouvent-ils plus de beurre ? Organiserait-on une
pénurie ?
Prof Hitérole : Je vais y répondre. Mais je reviens à Rachid
et à tous ces consommateurs qui se déplacent pour du beurre dans des magasins
non approvisionnés. Il faut savoir que tous ces consommateurs ne sont pas que
français. La demande mondiale en beurre aurait augmenté, selon la FAO (1) de +
2,5 % entre 2013 et 2015. Américains et Chinois sont particulièrement friands
de beurre depuis que 67 travaux compilés par les Annals of Internal Medecine
ont conclu, en 2014, que le beurre n’est pas si mauvais pour la santé ! En
gros, jamais le beurre n’a outragé notre corps !
Fabiano : Ah, ah, le burnout rageait, note record ! Ils
ont dû être en burnout les chercheurs pour pondre de telles niaiseries !
Pressés comme des citrons pour donner de tels résultats positifs et satisfaire
leurs donneurs d’ordre, les grandes sociétés beurrières !
Prof Hitérole : Quel mauvais esprit Fabiano. Mais peut-être
y-a-t-il du vrai dans votre remarque. Quoi qu’il en soit, le beurre est
réhabilité ! Fini les craintes de maladies cardio-vasculaires. La demande
croît mais la production stagne. D’où la pénurie !
Fabiano : Pourquoi la production stagne-t-elle ?
Prof Hitérole : On surtout de lait ! Il faut commencer par
laitage en dessous. Avant le beurre il y a le lait ! Il faut même 22
litres de lait pour 1 kg de beurre, sauf peut-être pour le beurre à lait-jets
fabriqué à partir de jets de lait légers…
Fabiano : Pourquoi manque-t-on de lait ? Je croyais
qu’on avait supprimé les quotas ?
Prof Hitérole : Oui en 2015. Les éleveurs ont pu alors
produire autant de litres de lait qu’ils le souhaitaient. Nos voisins ne se
sont pas gênés. Les Pays-Bas ont accru leur production et l’Irlande a fait du
lait un axe de croissance. Son cheptel se nourrit de l’herbe des près, en
plaine Eire et cela coûte moins cher que les granulés. En France, la
surproduction a fait baisser les cours. Les petits éleveurs ont fermé boutique
à ne plus pouvoir mettre de beurre dans leurs épinards. Il y a eu concentration ;
de grosses exploitations ont vu le jour,
cherchant le retour sur investissement. Mort des petits, extensions des grands,
on nage en plein darwinisme. L’augmentation de la production se voit alors
orientée vers un stockage de poudre de lait !
Fabiano : Ah oui, j’en ai entendu parler ! C’est de la
poudre de perlimpinpin, juste un mécanisme de régulation. La Commission
Européenne pourra remettre sur le marché la poudre stockée pour empêcher que
les prix ne remontent trop vite ; or, ils sont loin de remonter !
C’est ça ?
Prof Hitérole : Oui, en France, les distributeurs (Auchan,
Carrefour et j’en passe) tirent le prix
vers le bas, c’est laid ce prix scellé du lait ! D’un coup de baguette
magique ils font le bonheur des consommateurs et le malheur des producteurs. La
grande enseigne qui s’étend sort ce lait qui s’est ensorcelé d’un prix maudit que
fixent, comme par un décret, mages (comme parrains d’écrémage ?)…
Fabiano : Donc, à tirer les prix vers le bas, on décourage la
production…
Prof Hitérole : Oui, heu, enfin, pas si simple ! En
effet, comme la distribution ne veut pas baisser sa marge, les producteurs
costauds à qui on ne taille pas de costards (je ne parle donc pas des éleveurs
fragilisés qui tirent le taureau par les cornes) vendent plus cher à
l’étranger ! Enfin, s’ils le peuvent eu égard à une bonne production. Or
la production française de lait a chuté de 2,8 % entre 2015 et 2016 en raison
du mauvais temps !
Fabiano : Ah ! Oui ! Le printemps pourri !
Prof Hitérole : Oui, beaucoup de pluie et déficit de soleil ! Les 2/3 des éleveurs
redoutent un manque de fourrage ou une mauvaise qualité. Tout ceci fout rage
supplémentaire !
Fabiano : Encore un facteur qui ne plaide pas pour une
augmentation de la production laitière en France. Or si on produisait plus de lait
on produirait plus de beurre, non ? Ainsi il n’y aurait pas de
pénurie ?
Prof Hitérole : Pas si simple Fabiano. Car, quitte à me répéter,
je te rappelle que 22 litres de lait ne font qu’un seul kg de beurre ! Dans
un litre de lait, il y a en moyenne, 42 grammes de matière grasse servant à
faire le beurre et 33 grammes de protéines qui serviront pour le lait liquide
et cette fameuse poudre de lait que j’ai déjà citée ! A imaginer qu’on
puisse augmenter la production de lait on ne fera qu’accroître le stock de
poudre ! Il n’y aurait pas forcément plus de matières à baratter !
Fabiano : A bar à thé ? Qu’est-ce que le thé vient faire
dans cette histoire, professeur ?
Prof Hitérole : Ignorantus, ignoranta, ignorantum !
Baratter est l’action qui consiste à transformer la crème de lait en
beurre !
Fabiano : Ah, pardon, j’ignorais ! Donc vous pensez
qu’on ne peut pas trop augmenter la production et que banquet demeure, heu, que
manquer de beurre sera notre lot quotidien ?
Prof Hitérole : Oui, à moins qu’on nous trafique cette
pénurie, qu’on mette le beurre dans les épines : art ! Grand art de
la spéculation ! On crée la rareté pour empocher les marges !
Fabiano : Mon Dieu ! Que va-t-on faire ?
Prof Hitérole : Utiliser de la margarine en priant St
Hubert que la pénurie ne l’affecte pas de la même façon (voir la publicité).
Fabiano : Le boulanger : faire des viennoiseries à la
margarine ? Pourquoi pas ? Si choix s’accroît sans trimer :
prisons ! Mais si choit sa croissanterie : méprisons ! Je serai
alors récalcitrant à toute consommation d’un tel met !
Prof Hitérole : Et donc dans ce cas re-geint beurre !
Fabiano : Ha, ha, ha, bien vu ! En
attendant…surprise !
Prof Hitérole : Qu’est-ce ? Mais ! C’est du
beurre ? D’où vient-il donc ?
Fabiano : De Damme, en Belgique ! Et oui, il faut faire
de la route ! Je vous ai fait un sandwich au thon !
Prof Hitérole : Merci Fabiano ! C’est sûr que je vais
apprécier ce sandwich thon-beurre de Damme !
(1) Foad and Agriculture Organization.
Atteindre la
sécurité alimentaire pour tous est au cœur des efforts de la FAO - veiller à ce
que les êtres humains aient un accès régulier à une nourriture de bonne qualité
qui leur permette de mener une vie saine et active.