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Israël a rendu hommage dimanche au général Ariel Sharon, «héros» selon les médias mais «criminel de guerre» pour les Palestiniens, dont le cercueil est exposé jusqu’en fin d’après-midi devant le Parlement à Jérusalem.
Le décès d'«Arik» (diminutif d’Ariel), mort samedi à 85 ans après huit ans de coma, a plongé Israël dans une atmosphère de deuil national, avant son enterrement lundi dans sa ferme familiale du sud du pays.
Il était comateux depuis huit ans et visiblement l’euthanasie
active (comme passive) n’est pas l’apanage de l’armée israélienne encore et durablement hantée par l’état nazi.
Huit ans dans un tunnel, jusqu’à ce que sous tes reins,
le mal te frappe ô Sharon ! Le trépas pond (très Papon ?) parfois une
longue galerie : tu y prendras le
métro, le Sharon ! Tu craignais que rame allât en Cisjordanie, lieu où
l’on te lyncherait mais le train des profondeurs t’emmena au terminus et non à la
terre minée.
Huit ans sous terre ! Qu’y as-tu fait ? J’imagine que la vie a eu
largement le temps de passer et repasser en boucle !
Tu t’es mille fois revu en faucon car vrai stratège.
Tu as le cœur dur comme la pierre, certains te nommeront « Sharon-Stone ».
Impitoyable voire « boucher »
sauf pour écouter les mélopées israéliennes à la gloire du roi David. A 20 ans,
déjà officier d’infanterie, tu
combattras devant la forteresse de Latroun
sans jamais reculer devant l’ennemi.
Rien n’est interdit pour faire plier l’Arabe. En 1953,
à la tête de l’unité 101, au sang neuf, une équipe de choc composée de
parachutistes aguerris, tu lanceras des représailles contre le village de
Kibya : 69 villageois tués. Quelques regrets vite dissimulés sous la
conviction qu’on ne fait pas d’omelettes sans casser d’œufs.
Durant la guerre des 6 jours (1967) tu prendras à
revers l’armée égyptienne en franchissant le canal de Suez ! Tu cadenassas
le cas de Nasser ! Tu te gonfles d’orgueil comme un mongol fier :
Kahn a le dessus, aise !
Tu t’illustreras, de nouveau, à dessein, lors de la
guerre de 1973, celle du Kippour qui pourrit tes relations avec ton état-major
car tu as désobéi et ça les rend mossad !
Le sommet de ton infamie restera cet épisode criminel
de l’occupation au Sud Liban, en 1982. Pour éloigner les tirs de roquettes sur
le nord d’Israël tu lanceras l’opération « Paix en Galilée » ! Ton arbre belliqueux porte ses ramages en
Galilée apportant, dès lors, gueules en sang et de la mire (de fusil). Tes
armées s’engouffrent dans le pays du Cèdre jusqu’à Beyrouth. Là, des milices
chrétiennes massacrent des centaines de Palestiniens dans les camps de réfugiés
de Sabra et Chatila. Plus tard la justice de ton pays te destituera pour avoir
laissé faire les miliciens ! Responsabilité indirecte ! Tu voulais
trop réduire à néant les enfants de l’Islam ! Et d’Allah tu sabres A,
châtie l’A pour qu’il ne reste plus que deux L et H ! Mais ça ne suffit
pas ! Tu laisses la milice rugueuse terminer : un brin de zèle et
hache et c’est la boucherie !
Comment as-tu pu rebondir après une telle
infamie ?
La faiblesse de tes adversaires politiques te fera
monter au pouvoir. Hanté par les évènements de 1982 tu chercheras la voix de la
Paix ! Une sorte de chemin de Damas qui naît, en incrustant sur ta
route guerrière des petits éclats de rédemption argentée ! Oui, à présent
tu aspires à la Paix des Braves. Mais une Paix dans la sécurité !
Si la bande de Gaza est trop belliqueuse il ne faut
plus l’irriter. Tu feras évacuer les troupes de Tsahal de cette petite bande
côtière pour montrer de la bonne volonté d’apaisement. Sans l’occupation
israélienne Gaza gazouille. Mais, à
l’Est, en Cisjordanie, un mur de la honte se dressera pour assurer la sécurité
des colons, selon ta bonne volonté.
Ah, le fameux mur aux contours surprenants et au coût
abyssal. Un mur pour protéger les nouveaux arrivants israéliens. Tu inciteras
les colons juifs à «se saisir de
chaque colline, pendant qu’il en est encore temps».
Collons sans caler des colons sur collines aurait pu
être ton crédo.
En septembre 2000, tu graviras le mont du Temple
(l’esplanade des Mosquées pour les musulmans) pour enflammer les esprits d’une torche
provocatrice. Tu créeras l’étincelle de l’Intifada
(guerre des pierres), celle des jeunes palestiniens qui veulent en découdre
avec l’occupant !
Le 17 août 2005, 21 colonies seront évacuées. Quatre
ans plus tard, de guerre lasse et avec plus de quatre mille morts (les trois
quarts étant palestiniens) tu cesseras la poudre avec laquelle tu lessivais,
Ariel.
Le 1er février
2004, sous la pression internationale, tu annonceras : «J’ai
donné des instructions pour évacuer 17 colonies à Gaza. J’ai l’intention de
réaliser cette évacuation – pardon, ce redéploiement des implantations qui nous
causent des problèmes et que, de toute façon, nous ne garderons pas dans le
cadre d’un accord définitif.»
L’heureux déploiement pour les uns, trahison pour les
autres. Les rabbins s’indignent, l’hébreu gueule, les députés de la Knesset
houspillent qu’untel avive la décolonisation ! Des sinistres de ton propre parti, le Likoud, lancent
des appels à la désobéissance ! Likoud liquide les codes de bonne conduite
et pense à la désertion.
Mais tu tiens bon ! Le 17 août 2005, l’évacuation
de 21 colonies de Gaza et de 4 autres
dans le nord de la Cisjordanie débute. C’est une autre guerre des 6
jours : ce laps de temps suffira pour voir trente-huit ans d’occupation s’effacer sous
les décombres de pelleteuses. Chat rogne la souris colonisatrice.
Tu revois pour la ultième fois cette année 2006 !
Tu te vois conquérant pour une troisième
campagne électorale à la tête de ton nouveau parti, Kadima ! Mais coma qui
dit maux médicaux moud d’un coup Kadima !
Tu tombes dans l’inconscience sans pouvoir mener à
terme ton plan, ce plan surgi des ténèbres obsessionnelles de la sauvegarde de
ton peuple et soudain auréolé d’une certitude : le Grand Israël n’est pas
la terre promise des Juifs, n’en déplaise à la Bible !
«Je laisserai à une autre génération le soin de faire
une paix définitive avec les Palestiniens», oui,
tu as eu le temps de méditer et de « reméditer » cette petite phrase tandis qu’autour de
toi s’affairent les médecins impuissants.
Voilà, terminus ! Fin du tunnel ! La camarde
enfin qui te prend dans ses bras pour écarter un pâle sosie hospitalier.
Certains te pleureront, d’autres maudiront ta mémoire.
Et le problème israélo-palestinien promène indéfiniment sa longue carcasse à l'ombre des miradors, sous un soleil de plomb durci.