Des manifestants munis de drapeaux turcs devant le consulat de Turquie à Rotterdam, le 11 mars 2017 (AFP/Bas Czerwinski) |
Peut-on empêcher un ministre étranger
d’atterrir en son pays quand on le soupçonne de représenter un président qui vire
à l’autocratie ? C’est en tous cas ce qu’a décidé le gouvernement
néerlandais en refusant de voir poser sur le sol batave l’avion du ministre
turc des affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu. L’aéronef a dû poursuivre sa route et se poser,
samedi 11 mars 2017, à Metz, et l’ottoman commençant à avoir mal aux reins,
aima Lorrains…
Mevlut Cavusoglu
devait assister à un meeting-kebab « bras-dôner », organisé pour la
communauté turque à Rotterdam dans le cadre de la campagne du référendum prévu
en Turquie le 16 avril prochain sur le renforcement des pouvoirs présidentiels.
Il était censé convaincre une diaspora turque (près de 400.000 personnes d’origine
turque vivent aux Pays-Bas).
Mais l’autre
pays du fromage est lui-même en période électorale. Les législatives vont bon
train dans les champs de tulipes où poussent de mauvaises herbes anti-islamiques.
Alors, non, le
sbire d’Erdogan, ce maître d’Ankara qui veut s’asseoir sur la laïcité turque
(héritage de Mustapha Kemal), non, ce valet du Sultan ne peut venir chez nous,
clament les Hollandais.
Car Erdogan veut
faire de ce référendum un véritable plébiscite qui pourra graver dans le marbre
anatolien (il en aime Ordu) son « hyper présidence ». Si sa réforme
est acceptée après consultation du peuple il pourrait être président jusqu’en
2029, en échappant à la limite de deux mandats de 5 ans prévue par l’actuelle
constitution turque.
Et surtout, si
la réforme passe, elle permettra au président turc d’imposer la suprématie du
Président sur le Premier Ministre. La constitution actuelle désigne le 1°
ministre comme principal acteur de l’exécutif, et non le président, pauvre bougre relégué à des fonctions honorifiques que, parfois, des valets distants boulent.
Mais, depuis le
coup d’état raté et l’établissement de l’état d’urgence, Erdogan supplante son
premier ministre, prend les rênes en mains et procède par des craies sur le
tableau noir de la répression.
Refuser
l’atterrissage de son ministre revient donc à ne pas cautionner les pulsions
mégalomanes du sultan.
Mais c’est aussi
le faire insultant. Erdogan a traité de mâles faisans et autres noms d’oiseaux
les membres du gouvernement hollandais. Il a fait bloquer les accès à
l’ambassade des Pays-Bas, à Ankara. Il a procédé de la même façon vis-à-vis du
consulat du royaume à Istanbul pour « raisons de sécurité »
Il faut composer
avec moi sinon je rouvre mes frontières pour laisser passer les migrants et l’Europe
sera envahie, déclame Erdogan habile (dès qu’la merde au Ghana bile…heu oui
mais c’est un tout autre sujet que je traiterai un jour, ou pas...).
En attendant, la
brouille s’installe entre son rêve de grande Turquie et la position des
Pays-Bas (mais aussi celle de l’Allemagne de Mme Merkel). En jouant la surenchère avec La Haye et Berlin, le
maître d’Ankara mise sur une fibre anti-occidentale d'une partie de son électorat.
En traitant les Hollandais de "nazis" Mr Erdogan évoque "un vestige du nazisme" au pays des polders ! Il faudrait plutôt dire que la menace de vagues marines hisse lames aux phobies.