L’affaire Denis Baupin suit son
cours sous un plafond qui s’ouvre, libérant la parole de femmes trop longtemps
rompues au silence de la honte.
Le vice-président écologiste de l’Assemblée
Nationale a été contraint de démissionné à la demande pressante de son
supérieur, le Président Bartolone. L’homme n’a pas vraiment bonne presse depuis
que huit femmes ont témoigné sur France Inter et Médiapart de ses faits et
gestes à l’encontre de leur intégrité physique et morale : harcèlement et
même agression sexuelle.
Depuis, bien d’autres langues se
délient pour révéler au grand jour les mauvaises manières et les déviances de l’homme
politique.
Au lendemain des accusations
incriminant Denis Baupin, un collectif de 500 militants et d’élus de toutes
convictions politiques a publié un appel dans le journal Libération pour que l’impunité
cesse contre les auteurs de harcèlement sexuel.
Dix-sept anciennes ministres, de
leur côté, ont dit « stop » dans une tribune publiée dimanche 15 mai
2016. L’appel a notamment été signé par Roselyne Bachelot, Elisabeth Guigou,
Nathalie Kosciusko-Morizet, Christine Lagarne, Valérie Pécresse ou encore Rama
Yade.
Une initiative qui ne semble pas
ravir Christine Boutin. La présidente d’honneur du Parti Chrétien-Démocrate (et
ancienne ministre) s’est radicalement désolidarisée de ses
consœurs, déclarant même en avoir « marre, vraiment marre » de
ces femmes politiques !
Le porte flambeau de la résistance
chrétienne au mariage pour tous en veut à ces anciennes ministres qui laissent
entendre que les hommes sont des obsédés. Elle refuse le puritanisme, empêtrée
dans un amalgame qui lui fait confondre gauloiserie et harcèlement.
Dans ce genre de combat il vaut
mieux se taire que d’émettre des sornettes. Mme Boutin évoque une gauloiserie
qui ferait partie de l’identité française. Mais jusqu’où va cette gauloiserie ?
Et peut-on se satisfaire durablement de voir, au sein de l’hémicycle national,
voler des sifflements d’oiseaux, des petites remarques sexistes dès qu’une
femme prend la parole ?
La gauloiserie est le terreau du
harcèlement, il en crée les conditions. Elle établit un état latent de
domination de l’homme sur la femme devenue objet de dérision, et d’allusions
grivoises.
Les hommes ne sont pas tous des
obsédés mais une certaine légèreté, durablement enracinée dans nos modes
sociaux, s’attelle à tendre des perches pour passer du mauvais côté :
petites phrases déplacées, mains sur la fesse, harcèlement téléphonique.
Alors il est bon que les langues
se délient pour condamner des attitudes d’un autre âge. A défaut, les femmes
victimes continueront à subir en se culpabilisant d’être trop séductrices, en s’enfermant
dans l’omerta, dans la honte inexprimable…
Femme
enfermée dans le silence
Au
fil des gestes déplacés
Phagocytée
par la souffrance
De
ne pouvoir se libérer
Femme
emmurée dans l’Omerta
Pour
ne pas son mari troubler
Qui
mène seule un long combat
Contre
les démons obsédés
Femme
souillée trop hésitante
A
requérir les justiciers
Dans
la projection effrayante
D’un
tribunal médiatisé
Femme
agressée qui s’accommode
Pour
ne pas briser sa famille
Mais
dont l’énergie se corrode
Sous
un drap d’honneur en guenilles
Femme
humiliée par les sarcasmes
Au
nom de la domination
De
ce machisme qui fantasme
Donnant
de soi bonne opinion
Femme
angoissée par l’avenir
Qui
s’ouvrirait à ses poursuites
Une
carrière à en mourir
Par compétences éconduites
Femme
brisée sous l’impudeur
Salie
jusqu’au fond de son âme
Qui
désespère de voir l’honneur
Rendu un jour, tant vainc l’infâme.
Femme
abattue, jetant les armes
Au
cœur du silence assourdi
Et
qui choisit, au bout des larmes
L’irréversible
tragédie.