Mocky, pour moi petit enfant, c’était
le compagnon de Poupy. Ils formaient un charmant petit couple d’indiens dans
une bd-western humoristique que je retrouvais au cœur de mon magazine Fripounet !
Puis j’ai découvert Bourvil dans « un
drôle de paroissien » et j’ai su que le film était de Mocky. Et comme
indien ne vaut pas toujours mieux que deux « tu verras », j’ai eu l’occasion
de voir d’autres films de ce trublion du 7ème art.
Oui, Jean-Pierre Mocky a toujours
détonné dans le paysage du cinéma français. C’est d’abord une grande gueule qui
sait appeler un chat, un chat et ne va pas par le dos de la cuillère pour se
moquer du clergé ou de la société de consommation.
Lui-même ne fond pas dans la
dépense. Il est particulièrement parcimonieux avec mots des rations. Il limite
le travelling coûteux, rémunère peu ses acteurs et tourne ses films rapidement (le glandeur
aurait été tourné en 12 jours, ce qui semble paradoxal eu égard au titre !)
Mais de passer derrière la
caméra, Jean-Pierre Mocky aura débuté au théâtre ! Il suit les cours de
Louis Jouvet (car c’est un homme qui est berge). Le cinéma viendra plus tard. On
le voit, en 1949, au théâtre Montparnasse dans Le roi pêcheur de Julien Gracq.
C’est en 1959 (mon année de
naissance et je n’en suis pas peu fier) qu’il crée son premier long métrage « Les
Dragueurs » dont lequel on retrouve Charles Aznavour et Anouk Aimée, rien
que ça !
Il enchaînera sur 65 autres longs
métrages avec la même rage de déranger le petit esprit bourgeois. Beaucoup lui
prêteront un certain cynisme dont il saura se servir pour signer des œuvres à
l’humour grinçant enrobé de loufoqueries.
Le pamphlétaire caméraman n’a pas
son pareil pour critiquer la société. La Grande Lessive (1969) stigmatise,
déjà, les travers de la télévision (il faut dire que Drucker y sévissait déjà),
« Un linceul n’a pas de poche » en 1974, fustige le milieu du journalisme et « A
mort l’arbitre », en 1983, tire à boulets rouges sur le monde du football !
Les années 2000 s’avèrent pénibles
pour cet empêcheur de tourner en rond ! Les difficultés à financer les
films s’accumulent !
En dépit des tempêtes, il tient
bon la barre et n’hésite pas à dénoncer le lobbying des box offices français.
En 2010, il reçoit le prix
Henri-Langlois pour l’ensemble de sa carrière et, en 2013, le prix Alphonse
Allais même si sa fortune a l’fonds salé par les vagues d’emprunt.
Il nous quitte à l’âge de 86 ans
en nous laissant une œuvre éclectique où reposent, à tout jamais, la malice d’un
Bourvil, la pétulance d’une Jacqueline Maillan ou encore le cabotinage d’un
Michel Serrault !
Salut l’artiste !
SYNOPSIS QUE LE MAITRE N'AURA PAS L'OCCASION DE DECOUVRIR
Un drôle de paroissien sortit de l’hôtel l’Ibis rouge, situé 13
french street (mais, pourquoi cet anglicisme ?), en se disant que le lieu était le piège à cons pour les touristes,
oh yes !
Les araignées de la nuit ne lui avaient pas laissé l’ombre d’une chance et il avait passé des heures à jouer les insomniaques pour faire la grande lessive !
On aurait pu l’appeler Monsieur Cauchemar tant ces heures vénéneuses l’avaient éreinté jusqu’à
lui flanquer la grande frousse !
Il s’était plaint auprès de
l’hôtelier en lui reprochant ce sommeil noir
comme le souvenir mais l’homme avait feint de comprendre.
-
Vous avez dû
avoir des cauchemars ! Ici, tout
est calme ! Tous mes clients vous le diront : on goûte ici les saisons du plaisir !
Croyez-moi, cela vaut bien mieux qu’une
nuit à l’Assemblée nationale ! Je sais de quoi je parle : j’ai
été député, le mentor des radicaux
chrétiens, la victime de calomnies de
la part de mes détracteurs. On disait : tiens, voilà le glandeur ! Ou pire : le roi des bricoleurs ! Sans vouloir jouer les vierges effarouchées, je peux vous
dire qu’il y avait du grabuge dans l’hémicycle !
C’était vraiment la machine à découdre !
On n’y trouvait guère la bête de
miséricorde qui eût pu rendre les
ballets écarlates ! Je me souviens ! Quand j’ai dû m’expliquer
sur le dossier Toroto, vous vous
souvenez de l’affaire ? Non ? Et bien on m’a traité d’agent trouble ! Je me suis demandé
si j’étais bien dans mon pays, presque à m’exclamer : y a-t-il un Français dans la salle ? Ah, mes adversaires ne
me faisaient pas de cadeaux. J’en étais à regretter les compagnons de la pomponette, l’amicale de mes débuts où je
criais : votez pour moi !
- -
Je n’ai que faire
de votre vidange verbale, monsieur,
lui avait répondu le client sans jouer les snobs !
Je ne viendrai plus chez vous ! J’ai eu le tort de suivre les conseils de la candide Madame Duff, oui, vous la
connaissez, elle est déjà venue chez vous avec le Mari de Léon, votre
associé, avec qui, jadis, vous formiez un
couple !
- -
Et alors ?
Mes affaires de cœur ne vous regardent pas ! J’ai le droit de jouer les dragueurs avec qui bon me semble !
Alliance cherche doigt où bon lui
plaît ! Je joue l’étalon comme
il me sied, en solo si je le désire
et vous dis bien le bonsoir !
Ils s’étaient quittés fâchés.
Il était désormais le témoin que
dans cette ville à vendre au diable
il ne serait pas le miraculé à même
d’accorder crédit pour tous !
Il longea des jardins et
goûta le mystère des jonquilles. Rouges étaient les lilas quand il
retrouva le jardin public si bien agencé par les compagnons de la marguerite. Il y retrouva le cabanon rose où,
jadis, il avait connu Sylvia, la fille du robin
des mers, un humaniste dont le deal se
résumait à redonner la bourse et la vie
à des miséreux. Il les faisait voyager sur son voilier l’Albatros et jouait le bénévole de service en distribuant
son épargne. Le pactole changeait de
mains, fuyait tel le furet dans le
bois pour éviter le renard jaune !
Oui, il avait rencontré
Sylvia !
- -
Tu es si jolie ce soir, lui avait-il murmuré
- -
Chut,
avait-elle répondu…
La première nuit, alors qu’il
voulait, la divine enfant lui avait susurré :
-
- Dors mon lapin
Il l’avait mal pris, et,
comme il gèle en enfer, s’en était
allé, seul, dans la nuit, comme perdu dans Litan,
la cité des spectres verts, en référence à ce film qui appartient à la Mocky Story. En revenant, il avait
croisé des supporters ivres, de retour d’un match décevant et qui vociféraient :
à mort l’arbitre !
Puis, le cœur vide, ils
avaient rencontré les filles de joie.
-
- Tu viens chéri ?
- -
Je n’ai rien à
donner ! Mes poches sont vides ! Et d’ailleurs un linceul n’a pas de poches ! Alors, à votre bon cœur, mesdames !
Il s’était enfoncé dans la
nuit…
Une même nuit de cauchemars,
comme si la roue ne cessait de tourner.
Comme un moteur de caméra...
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