C’était hier, jeudi
20 avril, la dernière ligne droite de la campagne présidentielle.
Les onze candidats
étaient appelés à exposer leur programme devant Pujadas et Salamé, sur le
plateau de France 2.
Quinze minutes pour
s’exprimer, pour amener un objet qu’on emporterait avec soi à l’Elysée, pour
confesser un regret ou commenter une photographie exhumée des archives.
Une émission de fin
de route où chaque candidat se devait de soigner le fonds et la forme pour
continuer à séduire et accrocher le Français encore indécis.
L’émission s’annonçait
longue, sans surprise et l’ennui la guettait.
Et puis la nouvelle
est tombée. Soixante-douze heures avant le premier tour de l’élection
présidentielle, le fanatisme de Daech avait encore frappé.
Un policier avait été
tué sur les Champs Elysées au cours d’une fusillade dont l’auteur avait été abattu.
Deux autres policiers avaient été blessés ainsi qu’une touriste.
Une drôle d’ambiance
s’est alors invitée sur le plateau. Les candidats ont changé leur posture,
leurs paroles. Le terrorisme djihadiste remontait à la surface, envahissait
tous les esprits.
Le terrorisme venait
de mettre un point d’orgue sanglant à une campagne que vraiment rien n’avait épargné : affaires et mise en examen, dérapages verbaux, ralliement
empreint de déloyauté, petites phrases nauséeuses…
Daech ne pouvait pas
mieux agir, à quelques jours du scrutin, pour tailler davantage dans l’épiderme
fragile de notre démocratie et mettre le futur Président devant ses
responsabilités et l'ampleur de la tâche !
C’est la dernière ligne droite
Avant les urnes décisives
Qu’on soit de gauche, qu’on soit de
droite
La « Com » se doit d’être incisive
Marine affûte ses meetings
Instrumentalise à gogo
Et s’assure un parfait brushing
Pour masquer des faits illégaux.
François relègue Pénélope
Au rayon du passé véreux
Lit chaque jour son horoscope
En sourcillant d’un air peureux.
Emmanuel poursuit sa marche
En ratissant les sans abris
Les sans parti ;
sa belle Arche
Ne craindrait ni rixes ni bris.
Benoît rame assez en amont
En se disant : De quelle paix-est
ce
Faux semblant d’une exaltation
Qui brument les yeux de détresse ?
Jean-Luc régit ses hologrammes
Excelle en don d’ubiquité
Joue sur avenirs de drame
Si d’aventure on le boudait.
Demeurent enfin tous les sans grades
Au fond des sondages enlisés
Loin des sons d’heures de la parade
Mais qui s’accrochent sans flancher
C’est la dernière ligne droite
Sur l’écran des téléviseurs
Ou chacun de manière adroite
Séduit l’indécis d’électeur
Une émission où chacun dit
En quinze minutes à sacrifier
Ce qu’il nous a toujours émis
Au fil de mots préfabriqués.
Un show à l’ennui destiné
Policé dans ses conventions
De Pujadas à Salamé
Nulle âpreté d’inquisition
La violence vint du dehors
Dans l’effroi des Champs Elysée
Daech repeignit le décor
D’un triste rouge policier
Et tout ce décor d’opérette
Ourdi de phrases convenues
Tomba de gravité parfaite
Plomba de tourments sa tenue.
Il récupéra sur sa scène
Colère sourde, indignation
Compassion mâtinée de peine
Et l’instrumentalisation
Tristesse en ces fins de campagne
Sur des visages fatigués
Le terrorisme en vile compagne
Et l’avenir plus que brouillé.
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