Ce lundi 17
mars 2014 Jean prend sa voiture qui a une plaque impaire. Pour ne pas commettre
d’impair il a revérifié le numéro : 109 comme sang neuf, facile à retenir
pour un infirmier spécialisé dans la transfusion sanguine qu’il n’effectue pas
sans gain même si on pourrait penser à l’augmenter !
Oui, il peut
rouler mais dans sa voiture la BBC égrène : Londres, ici Londres un fog
parle au fog ! Je répète : cars ôte, cars ôte !!
C’est le branle bas de combat ! A cause des pics de pollution les épicdémiologistes
ont averti les Pouvoirs Publics du risque de continuer à faire rouler tout le
monde ! Alors comme la pollution a le terne la circulation aussi !
Sur Paris et
22 communes (22 à cause des flics qui surveillent) de la proche banlieue seules
les voitures à immatriculation impaire peuvent rouler ! Certains pères
écrivent aux maires :
-
Vous pouvez agir pour une dérogation ? Je suis père pair et
voudrait rouler !
Mais les
maires n’ont nulle compétence ! L’un d’eux a même dit :
-
Cette cause m’est éthique ! Et la mesure, n’en déplaise à
NKM, n’est pas cosmétique ! Elle ne favorise pas peau-lueur.
Oui, Jean
peut rouler tout en écoutant la radio Paris à présent. Les actualités défilent
sur le pic !
La grisaille
enveloppe la cité ; c’est vrai qu’elle en veut l’opacité !
A un
carrefour les flics surveillent ; gare si t’es pair ! Pars si t’es
guerre !
-
Quel arrêt niais, lance un chauffeur, dont le numéro épeire.
Il se fait
plaquer par la police et c’est la contredanse !
Tout en
roulant, Jean songe à ses collègues de travail, ceux qui sont pairs et qui s’occupent
des scléroses en plaques. Ils vont sûrement covoiturer ! Pic est pic et
collègues rament ! Soudain il freine sec ; ça pile ! Un nouveau
contrôle crée des ralentissements. Un bonnet rouge, livreur de surgelés négocie
avec un agent : oui mon numéro est pair mais regardé le logo de ma société
sur la portière : plat « Quimper »..je peux rouler ?
Jean quitte
ce goulet d’étranglement. Il longe à présent un camp de Rom. Là tout est taudis
et zèle ! Comment font-ils pour vivre ainsi ? Sa réflexion est coupée
par un petit poème jaillissant de la radio :
Motorisés
M’ôtent
horizon
J’aimerais m’autoriser
Un ciel bleu
de passion
Si même les
poètes s’y mettent. On ne parle plus que de ça.
Jean croise
une voiture à numéro pair mais elle est au courant qu’elle peut rouler vu qu’elle
tourne à l’électricité. Cela dit, songe Jean, un conducteur d’une électrique
peut-il se dire : roule sans arrêt, va !
Non, la fée
électrique a besoin du nucléaire. Soudain il pense à Fukushima !
Nouvel
arrêt, nouveau contrôle ! Un policier déjà complètement conditionné répète
à l’envi : pair…ok, pair…ok, pair…ok, pair…ok ! Le pauvre !
Un homme lui
demande de s’arrêter :
-
Vous pouvez me prendre en covoiturage ?
-
Oui, vous avez quel âge ?
-
Heu, 49 ans, ça va, c’est impair ?
-
Oui je vous prends : un an de moins et je vous refusais !
-
Ah oui, 48 ans, c’est pair, quel humour !
-
Non, là n’est pas la raison : je ne peux pas conduire de car
en twittant !!
Evidemment c’est
une boutade. Jean ne twitte jamais au volant mais il faut bien se redonner du
moral. A la radio on entend des échos de mécontentement ; écho vois-tu
rage ?
Le covoituré
s’appelle Patrick et s’avère serveur dans un salon de thé (Patrick au thé). Il
blague pour détendre l’atmosphère de particules. Il dit que son voisin a des
accointances avec la gendarmerie !
Il m’a dit :
j’ai négocié avec un ami pandore ! J’ai une plaque impaire mais au besoin, s’il
pleut, une plaque paire m’est habilitée…Ah, ah, ah, perméabilité ! MDR !
Jean rit et
de boutades en boutades arrive au lieu de dépôt de Patrick. Il reprend la
route. Il culpabilise un peu. Il peut faire rouler sa mécanique, lui ! Il
bénéficie comme d’un permis de polluer… La voiture pète, contre pète, cale en bourg ! On dirait que le manque d’oxygène fait des jeux de maux. Il est
tant d’arriver !
Au boulot on
ne parle que de ça. L’hôpital accueille des insuffisants respiratoires !
Des poumons on prend des clichés car pic scelle le sort peu envieux des
asthmatiques !
Après une
journée de travail Jean, fourbu, plonge dans le bras de Morphée. Un cauchemar l’atteint
dans la demi-obscurité de sa chambre. Il est envahi de chiffres et de plaques
qui le narguent. En sueur il se réveille et crie « Paix, nombres ! »
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