Ce jour-là Aria en a plus
qu’assez de traîner dans les cases étroites d’une bande dessinée médiévale que
le fantastique n’arrive plus à
enluminer. Elle se sent bien à l’étroit dans cet univers que lui impose, depuis
des lustres, Michel Weyland, son père génétique.
Elle quitte cadres et bulles
sans le moindre préavis, au débotté, dès potron minet, et se retrouve dans le
XXIème siècle sans la moindre transition.
Comment atterrit-elle dans
une cuisine de collectivité ? Cela reste un mystère !
Toujours est-il qu’elle se
retrouve affectée à la plonge ! On confie à l’Aria deux bacs en raies
majeures, approximativement colmatées
par de la résine génétiquement modifiée.
Au début le sourire lui vient :
la vaisselle lui permet de gagner un peu sa vie même si parfois elle lui semble
sale, Aria. Le principal du collège n’est pas un tendre et la conspue
souvent pour sa lenteur. Comment peut-il avoir l’intention, en voulant tancer, d’aider
le CDI ?
Car Aria a décroché un CDI
mais, à la longue, elle s’étiole dans ce travail ingrat et d’un gras gris. Un
matin, elle ne revient pas et erre le
long d’un lac, l’âme vide. Elle regrette finalement ses longues chevauchées
moyenâgeuses.
L’eau lui semble polluée et
stagnante. Des moustiques volent à la surface. La jeune femme ressent le retour
de peurs ancestrales : les maladies contagieuses colportées par les
funestes diptères. Cela te fait mal, Aria !
-
Le plus clair de
nos terres semble sale, note Aria. Qu’ont fait les hommes depuis l’époque des
chevaliers ? On dirait qu’ils ont tout dégueulassé !
La faim la tenaille. Elle
achète au marché du bourg le plus proche un kilo de poires. Elle aime les
comices Aria, celles qui lui donnent la peau lisse. Hélas, le reste de sa
journée s’épuise dans des spasmes abdominaux, des tremblements intestinaux et
de longues délivrances nauséabondes, dans les fourrés, à l’abri de regards
indiscrets. Ça n’arrête pas de fuser : tout en Aria naît spasmodique (tout
en Arianespace modique ?)
Alors l’obligation d’agir
actionne Aria ! C’est capital ! On ne peut pas dire pourtant que la
haie s’aère, elle !
Je vais contre la pollution,
les dangers des pesticides, porter la guerre sainte, lâche Aria !
Une révolte secrète Aria. Une
nouvelle Aria, écolo convaincue.
Elle frappe à la porte des
verts EELV. Les agitateurs d’idées environnementales sont en pleine discussion
autour de la future primaire !
Bonjour, je suis Aria !
Je voudrais faire quelque chose pour la planète !
Ça se voit ! Rien qu’à
ton accoutrement rustique très « développement durable ». Qu’est-ce qui te motive ?
La protection de notre
planète ! C’est notre mère ! On lui doit beaucoup !
Je sens comme l’aveu « dettes »,
Aria ! Soit la bienvenue par minous qui ouvrons toujours les bras à qui
fait l’idée (acquis félidé ?). On a besoin de quelqu’un au standard !
Mais il faudrait quand même un autre vêtement, pour des raisons…heu, médiatico-politiciennes !
Et c’est ainsi qu’Aria se
retrouve à gérer des appels téléphoniques, principalement des numéros verts.
Cette expérience ne dure pas
longtemps. Dès le 3ème jour, alors qu’elle répond à une jeune fille
désireuse d’adhérer au mouvement, elle entend des rires sournois !
Pourquoi riez-vous ainsi ?
Hi, hi, hi, c’est ton accent
et ta façon de parler ! On dirait que tu sors du moyen-âge !
La jeune fille
A ri avec ses parents cools
Aria vexée part en couilles :
Vous me faites …(censuré) tous !
Elle claque le combiné qui
manque se briser ! Elle quitte les lieux sur le champ, ôtant ces cils du
flot de mails et texto en attente.
Elle veut rejoindre le monde
étrange qu’elle a quitté.
Weyland, en père débonnaire,
accueille sa fille prodigue ! On dirait de l'évangile !
La jeune femme demande pardon
mais le père lui dit :
Il faut que s’envole honte
Aria ! Je suis trop content que tu reviennes bosser chez nous ! L’inspiration
me manquait !
Un seul être vous manque et
tout est dépeuplé !
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