Samedi 14 mars, après midi, à Lille.
Martine Aubry et d’autres résidents de la République s’affairent pour que la fête lilloise soit encore plus réussie qu’en 2004.
Il y a 2043 détails exactement, à voir sur la check list : des costumes de chaque participant au défilé jusqu’à la moindre lampe d’éclairage.
- C’est comme un lego, dit Didier Fusillier, le directeur de LILLE 3000, s’il manque une pièce c’est moche ! Avant j’avais un pense bête très limité et qui fonctionnait avec une pile alcaline. Ca "buguait" souvent. Depuis j’ai investi dans un gros agenda électronique. Depuis quelques années nous faisons envie à nos voisins européens. On joue les européennes à notre façon : la manière culturelle. Cette année place aux pays de l’Est ! Nous faisons venir des artistes de Russie et pour eux ce sera mieux que le dimanche à Tchernobyl. Comme en 2004, le centre de Lille sera noir de monde !
Ma petite entreprise ne connaît pas la crise, dit Martine Aubry. J’espère qu’encore une fois on aura un week-end doux ! Moins froid que les nuits d’Halloween !
Depuis 5 ans les projets culturels vont bon train dans la capitale des Flandres. D’énormes budgets sont alloués pour faire venir des artistes-pointures du monde entier. Souvent au détriment des artistes locaux…Mais d’où Martine sort-elle ces milliards de nuit ? Dans le frigo ? Ne lui dites pas qu’elle met trop d’argent dans les feux d’artifice : elle devient renfrognée ! Oui, Martine boude !
La foule arrive ! On vient de toutes parts de la métropole lilloise. Mais on vient aussi de l’autre côté des frontières : à Ostende s’est créé un comité d’ irréductibles supporters de Lille-Culturel !
C’est la procession rue Faidherbe. Les grands voyageurs du culturel-fantastique-éphémère s’agglutinent comme des sardines pour laisser passer les chars de musiciens ou les grues qui élèvent en suspension d’énormes pantins lumineux. Plus loin, sur un trapèze, évolue une demoiselle accompagnée par des tambours, eux aussi en suspension dans le vide, sans avoir le vertige de l’amour…
On trouve de tout dans le public : une Cendrillon de Chinatown, après une Idylle au Caire se met à danser place du Théâtre en Kimono !
Un Roubaisien m’a dit : J'sors avec ma frangine. Y'a des jours comme ça ! C’est ma femme que je ne supporte plus ! C'est la faute à Dylan : elle l’écoute à longueur de journée ! Elle boit aussi !! Alors je lui dis : Je fume pour oublier que tu bois. Franchement, L'amour c'est pas confortable !
J’ai juste eu le temps de capter son état d’âme car déjà la foule volontaire nous pousse vers d’autres artères de la ville. C'est comment qu’on freine ? Quel monde ! On se croirait à l’arrivée du tour !
Je commence à avoir faim ! Que n'ai-je pas pris le temps de manger avant !
Je m’installe à un restaurant. On me propose la carte. Un plat attire ma curiosité : Rognons 1515 ! C’est Marignan ? Je ne demande même pas l’avis du serveur ! De toutes façons je ne suis pas un Aficionado des rognons.
A la table voisine un couple mondain parle fort. La femme, apparemment s’appelle Joséphine. Elle demande à son mari si elle peut commande un magret de canards :
- Osez Joséphine ! lance l’homme avec des effets de manche !
Il y a des gens, vraiment, qui ne sont pas discrets. Un tel comportement extraverti ça cache quelque chose ! De la fenêtre du restaurant je contemple la foule à perte de vue !
Avant de manger, j’envisage d’appeler Elvire sur mon portable. Pas question que j'perde le feeling avec elle ! Je sais qu’elle peut m’en vouloir de m’être trompé d’érection un jour où je m’étais montré intrépide malgré la fièvre ! J’avais eu une aventure avec le pianiste de l’Eden (un piano bar de la région) ou plutôt...la pianiste ! J’avoue : je ne suis pas toujours sur la ligne blanche. Elle l’avait su ! Elle m’avait dit : tu m’as jeté ! Outrage !!
Après d'âpres hostilités et de «reviens-va t’en » elle m’avait enfin concédé : je désire te revoir ! Et blas blas … Mais je suis conscient, qu’à ses yeux, j’passe pour une caravane et la nuit je mens ! On se voit très peu : elle est hôtesse de l’air et elle fait l’avion ! Madame rêve de grands voyages !
- Allô, Elvire !
- Ah c’est toi ! Je t’ai manqué ?
- Comme chaque nuit bébé. Tant de nuits sans toi !! Jamais d'autre que toi ne pourra venir me chasser les lendemains qui tuent !!
- Sommes-nous dans un Roman photos ou dans les Volutes d’un Poisson d'Avril ?
- Tu ne me crois pas ? J'écume tout ce passé de Malédiction pour chercher à te revoir ! Tu es ma Milady, l’ Élégance faite femme, ma Prise femelle !! Ma..
- C’est ça, et moi j’croise aux Hébrides un Camping jazz !!
Elle me raccroche au nez ! Je me retrouve comme un imbécile ! Je mange sans appétit ! Mais je bois beaucoup, beaucoup !! Au loin j’entends une fanfare qui entame une Fantaisie militaire. Je vais au lavabo pour me rafraîchir les idées. Je sors et suis la ficelle des badauds festifs jusqu’au quai du Wault. A deux pas, une chorale entame une Ode à la vie.
Là, les Pyromanes se pressent pour déclencher les Fallas (tradition espagnole consistant à embraser des constructions si longtemps élaborés ! Quel gâchis !! On appelle cela de l’art éphémère !). Mais la chaleur issue de la combustion me permet de m’évader de mes prisons. Elle me réchauffe aussi. J’ai l’impression que je me dore à l’incandescence ! Dans la foulée un superbe feu d’artifice clôture cette géniale soirée. Mais l’alcool me rattrape. Y’a un yéti ou peut-être l’araignée dans ma tête lourde ! Un âne plane dans le ciel.. Non, c’est une fusée qui s’éteint ! La dernière du feu final !!
J'ai longtemps contemplé cette fusée…Puis j’entends gueuler derrière moi :
- Tu touches pas à mon pote !
Je me retourne et voit une femme qui engueule la fameuse pianiste de l’Eden !! Elle me reconnaît et se jette dans mes bras ! Mais cette fois ci je n’ai pas l’imprudence de la recueillir ! Je rejette la Vénus ! J’irai même jusqu’à dire que je tuerai la pianiste pour retrouver l’amour d’Elvire. Mais agir ainsi, est-ce aimer ?
J’ai mal à la tête. J’aimerais tant appeler SOS Amor !!
Je rentre en titubant chez moi. Un peu dans l’irréel !
La fête ça ne me réussit pas !!
Je plonge sur le canapé du salon. A moitié dans l’inconscience j’active la télécommande de mon lecteur de CD. Depuis ce matin, la dernière galette de Bashung repose dans l’appareil, sous la tête de lecture, prête à démarrer. Je m’étends sur le long couloir de velours, la tête posée sur un coussin. Les premières notes s’égrènent. Puis la voix d’Alain…
Mon chat angora me voit tomber dans le sommeil.
Alain, lui, y est tombé, il y a quelques heures, définitivement…
2 commentaires:
Vous avez fait un très bel hommage à un très grand homme et à un chanteur que nous n'oublierons jamais.
très dégourdi. je l'adore... xoxooxox
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