Les urnes pour les présidentielles ont parlé
en ce dimanche 23 avril 2017.
Les partis
traditionnels ont volé en éclat. Fillon, que trop de casseroles accompagnaient,
a fini 3ème de la course à la Présidentielle (20,01% des suffrages
exprimés). Mélenchon, qui grimpait dans les sondages, n’a glané que la 4ème
place (19,58%)
La plus terrible
claque est assenée à Benoît Hamon. Le représentant du PS ne glane que 6,36 % des
voix ! La rose est totalement flétrie depuis le temps qu’on le craignait
mais, chez les Républicains, la déroute du Sarthois va provoquer bien des
remue-ménage.
Mariane se réveille
avec une gueule de bois quand bien même elle s’y préparait. Elle doit choisir
entre Marine Le Pen, seconde en lice (21,30 %) et Emmanuel Macron (24,01%)
arrivé en tête alors qu’on ne le connaissait à peine il y a 1 an (si ce n’est
que comme Ministre de l’Economie et démissionnaire)
Le mouvement « En
Marche » que le jeune énarque a mis en branle a eu un départ foudroyant.
Il a ratissé à gauche comme à droite, ralliant à lui des déçus divers et
profitant d’une faille dans le système. Intelligemment Emmanuel Macron a senti
un besoin de recomposition du panorama politique français.
Marine Le Pen, quant
à elle, se qualifie pour le second tour presque sans surprise. Le pays semble
désormais accepter que le Front National qu’elle représente s’invite aux plus
hautes marches ! Nul ne s’en émeut ! Les esprits sont bien loin de la
fronde de 2002 quand des milliers de gens étaient descendus dans la rue pour gronder leur colère
et appeler à voter Chirac afin d’éviter la victoire de Jean-Marie Le Pen.
Oui, Marine en
polissant le discours a anesthésié des résistances. Et pourtant ne nous y
trompons pas : le FN reste un parti profondément raciste, appelant à se
replier sur nos frontières, à tourner le dos à l’Europe et à chasser l’étranger
qui « prend le travail du Français ».
Oui, comme touché
par Alzheimer, le pays a oublié ses vieilles luttes. Il est perdu. Sa lucidité
s’est atrophiée.
Mélenchon, si
virulent il y a 5 ans, s’est drapé dans un mutisme. Il n’appelle pas à voter
contre Marine. Son silence pourrait presque être considéré comme une
acceptation ou, tout au moins, une résignation.
A moins qu’il ne s’agisse
là que de savants calculs stratégiques pour les futures législatives.
La France n’a plus
de boussole. Elle a rejeté les deux piliers de sa démocratie et se retrouve
devant un choix nouveau, hors partis traditionnels.
Selon les analystes
les choix se drapent de divers critères : France du repli sur soi et de la
préférence nationale (Le Pen) contre France de la Mondialisation et du
libéralisme (Macron) ou la France des pauvres, des victimes économiques (Le
Pen) contre France des riches et des actionnaires (Macron) ou encore la France de
l’antisystème (Le Pen) contre celle du système (Macron)…
A tous égards ces
schémas manichéens n’aident en rien les choix des Français. Le pays commence à
se faire peur en redoutant les projets fous de la fille du borgne tout en doutant
de l’efficacité du programme du jeune énarque à redresser le pays dans un
univers de concurrence souvent déloyale.
La France reste
coupée en deux mais la dichotomie a changé de peau. La rose ne combat plus le
front bleu républicain. Désormais un parti raciste et qui féconde sur le
terreau des misères du Monde ne peut être bloqué que par un mouvement en
marche, encore embryonnaire et constitué d’une galaxie d’hétérogénéités, aux
sensibilités parfois antinomiques (de Hue, le communiste à Madelin, le libéral…).
Une situation qui ne
fera qu’accroître le psychodrame français et, je le crains, la consommation de
psychotropes déjà bien ancrée en notre hexagone.
Des cartes ont été rebattues
Sur le tapis d’institution
Les deux grands partis se sont tus
Au bout de leur douce illusion
La rose a perdu tous pétales
N’embaume plus sous les rayons
Réchauffant les cieux d’idéal
La rose est tue sous liserons.
Les républicains ont coulé
Dans l’océan d’indignation
Au cœur des embruns frelatés
Par les vapeurs de corruption
L’inconnu reste seul en lice
Sur les gravats noirs de la gauche
Mélenchon pris de maléfices
De sa rancune se rapproche
Dans l’urne s’est glissé l’intrus
Ecartant le manichéisme
Bleu contre rose, vil impromptu
Bien inspiré d’opportunisme
En chantre du libéralisme
Qui protègerait les petits
Emmanuel joue du lyrisme
Entre ses lauriers rajeunis
Parti de rien, et sans parti
Au loin d’un système essoufflé
Il a relevé le défi
De gagner le premier trophée
Face aux espoirs qu’il ensemence
La crinière blonde effarouchée
Par une Europe qui l’offense
Marine est là, portant l’épée !
La patriote repliée
A l’intérieur de ses frontières
Combat l’élégant chevalier
Aux larges visions planétaires
Retour au franc du doux passé
Dans les sillons protectionnismes
La fleur marine sent la nausée
Dans les brouillards de l’archaïsme
Le juvénile énarque étend
Son long drapeau de l’échangisme
S’évertue dans de vrais serments
Enjolivés de pragmatisme
C’est le combat de deux visions
Les grands replis identitaires
Contre farouches ambitions
De s’ouvrir à la terre entière.
Un grand duel qu’on redoutait
Et qui laisse orphelins les clans
Des idéologies rouillées
Erodées sous le poids des ans.
Entre la louve et le fougueux
Il faudra bien choisir son camp
Ou se noyer au fond des yeux
Sous une lune de tourments.
Aux chemins de l’abstentionnisme
Se croiseront des cœurs perdus
Nus de tout existentialisme
Pris dans le doute des vertus
Autant d’errances résignées
Au retour de la bête immonde
Ou blotties sous le bouclier
De l’homme à l’évasive fronde
L’écho du front républicain
Balbutie du fond des abysses
Le démon joue le chérubin
Et son combattant le hérisse.
Mutisme froid d’anciens guerriers
Qui combattaient l’ignominie
Et qu’on retrouve désormais
Noué de prudences transies.
Marianne est nue de tous repères
Éberluée dans ses fantasmes
On craint tout autant la vipère
Que son chasseur, en ce marasme…